POUR CHANGER (VRAIMENT) L’ECOLE… ET
CONSTRUIRE UN SYSTEME SCOLAIRE A LA HAUTEUR DES ENJEUX DE NOTRE DEMOCRATIE Christophe Chartreux |
Quelques thèses qui traversent cette
contribution : 1- Il
n’ y a pas eu d’age d’or de l’Enseignement 2- Les
tenants de l’ « Ecole d’hier » nous mentent 3- Les
Enseignants actuels, dans leur immense majorité, ne fabriquent pas de crétins 4- Les
programmes actuels n’ont rien à envier à ceux d’ hier 5- L’Education
n’a pas fait sa Révolution (et c’est dommage) 6- La
recherche pédagogique n’est pas entendue, et ceci depuis des décennies (On
ne peut donc l’accuser des maux et défauts de notre enseignement) 7- Tout
ne va pas bien pour autant et une réforme profonde de la formation des
Professeurs est à mettre en place en y associant la recherche pédagogique 8- L’orientation,
notamment post-bac, est inexistante de fait. C’est une erreur de croire que
l’avenir de nos futurs étudiants se trouve dans les brochures de l’ONISEP I – Analyse de l’École et de son contexte (cette partie s'appuie partiellement sur l'ouvrage de C. Guigon, N. Gauthier, M.-A. Guillot, Les instits, Paris, Le Seuil, 1986) 1- « L’ ECOLE N’EXISTE
PAS ! » Qu’est ce que l’
Ecole ? Si la question paraît simple, la
multiplicité des réponses en révèle en fait la difficulté sous-jacente. On
entend d’ailleurs tout et le contraire de tout! Depuis quelques années, la méchante humeur a trouvé ses porte-parole: SOS Education, Sauver les Lettres ou Jean Paul Brighelli, auteur de La Fabrique du Crétin et gourou auto proclamé « spécialiste » d’à peu près…tout, s’époumonent contre ceux qu’ils appellent les Pédagogues ou, pire encore, les « pédagogistes », quand ce ne sont pas les « pédagogos », responsables à leurs yeux des maux, réels, supposés et inventés, qui frappent notre Ecole. Rien de bien nouveau d’ailleurs dans leurs protestations. Ils rejoignent la mère de famille qui, après telle ou telle émission de télévision, déclare, outrée : « Mais ma fille n’apprend pas tout ça à l’école ! Sa prof est nulle ! » CQFD !... ; mais aussi cette institutrice à deux ans de la retraite et qui se souvient ou croit se souvenir de ses premiers élèves : « Ah mais ils étaient bien meilleurs ! Et bien plus polis parce que bien mieux élevés ! » ; et encore le politicien, de droite comme de gauche, faisant de l’Ecole une cible facile : «Le gaspillage financier est intolérable ! Les enfants ne savent plus rien ! » ; enfin le syndicaliste participe lui aussi, à sa manière, au concert : «Il manque des moyens, des postes et des sous ! ». Une cacophonie sans nom ! Dans le même temps, on entend le discours exactement inverse : « Ce que font mes enfants aujourd’hui à l’école est extraordinaire ! Comme j’aurais aimé pouvoir en faire autant, de mon temps ! Même de l’informatique ! Et ils lisent de beaux livres ! » s’émerveille une maman. « Mes élèves sont polis et leur niveau est bien plus élevé que celui auquel je m’attendais ! » renchérit ce professeur d’école tout étonné de ne pas avoir à mater une horde de sauvages. Jusqu’au Ministre qui promet, à son entrée en fonction : « Je n’attacherai pas mon nom à une nouvelle réforme. D’ailleurs, tout ne va pas si mal ! ». L’euphorie générale! Mais alors l’Ecole, qu’est ce que c’est ? Bien difficile à dire, n’est ce pas ?… En fait, j’affirme ici que l’Ecole…ça n’existe pas ! Elle a toujours ses quatre murs, une cour de récréation, des salles de classes et parfois une devise républicaine à son fronton mais elle n’est que DIFFERENCES : - là une bâtisse bétonnée ou « ferraillée » surgie au milieu des HLM - ici une bonne vieille école de village jouxtant la Mairie et bâtie de plain-pied, en pierres, avec ses fenêtres donnant sur les platanes de la cour et juste après le muret, la campagne qui commence. - enfin l’école parisienne, souvent de briques rouges, dont l’entrée surmontée du Drapeau tricolore donne sur un escalier de bois blanchi par l’eau de Javel des lavages. Et dans chaque classe, des maîtres et des maîtresses tous différents par l’âge, l’origine et la formation. Et dans chaque classe, des enfants différents par leur culture, leur milieu et leurs capacités. Et tout ce petit monde DOIT travailler ensemble, au même rythme si possible, pour atteindre toujours ensemble l’objectif assigné à l’Ecole depuis la IIIème République et toujours en vigueur : « Apprendre à lire, écrire et compter ». Peut être est-elle là, la cause
de tous ces maux, réels et imaginaires. Après la Seconde Guerre Mondiale,
l’Ecole change de rôle et de fonctions, et ceci plusieurs fois de suite. Des
réformes nombreuses voudront la transformer ; bien peu seront
effectivement appliquées. Aucune, de fond ni d’importance, ne le sera sur des
durées excédant 5 ans. Elle conserve
des rites et des manies immuables. Sa « clientèle » s’est diversifiée
et massifiée. Les parents et quelques autres en font le bouc émissaire d’une
société post industrielle mal dans sa peau. Pourtant elle garde des
règles de vie et des pratiques pédagogiques héritées du siècle dernier. L’échec scolaire a bon dos ! Il
résume tout et n’explique rien ! (Voir paragraphe 3 du présent
travail) 2- EDUQUER ET
INSTRUIRE Les professeurs d’école, mais aussi l’ensemble de la profession enseignante, s’assignent des objectifs très souvent divergents : -
1977 : Etude SOFRES/Monde de l’ Education :
-
Septembre 1984 : Etude IPSOS/Le Monde
La synthèse des deux missions, Eduquer/Instruire, avait été établie par Jean Marc Favret en 1985 pour le CNDP : « Education et
Instruction sont inséparables
(…). L’enfant doit apprendre à bien lire, écrire et compter et, dans
le même temps, à se situer dans le
monde qui l’entoure. (…) Qu’on le
veuille ou non, qu’on en prenne conscience ou non, toute classe
est une classe hétérogène. Les
origines culturelles et sociales, les diversités linguistiques et techniques
croisent à l’envi les différences d’apparences et de comportements. Le public
de l’école est varié mais sa mission reste unique. Or le système scolaire doit
permettre à chacun de s’outiller pour la vie. ». Concilier la vie des enfants et les objectifs assignés à l’éducation -instruction comprise- est le lot commun de TOUS les enseignants. Même les inconditionnels des « savoirs » ne peuvent pas contourner cette donnée. Celui qui affirme « Je n’ai aucun problème de discipline » n’explique en fait que son autorité, son influence, son pouvoir de séduction permettant d’obtenir de ses élèves les conditions qui permettent de travailler. Et ce travail qui conditionne l’instruction, c’est l’éducation. Malgré (ou à cause de) cette querelle Instruction/Education, l’évolution de l’Ecole me semble paradoxale. On pourrait facilement démontrer que, contrairement aux affirmations de certains tenants du fameux « c’était mieux avant », rien n’a fondamentalement changé : le tableau noir où sont encore très souvent inscrits les incontournables exercices du BLED, Bible de l’orthographe ; l’estrade ; les boites de craies ; parfois même les paquets d’images, tout est encore là. La configuration des tables a été à peine revue et corrigée en collège et lycée après mai 1968. Et tout cela aussi bien en milieu rural qu’urbain. Seules fantaisies concédées à la tradition : des murs repeints et un micro ordinateur (plus imposé que choisi), mais…le bureau du maître toujours face à ses élèves ! (C’est symbolique car j’ai parfaitement conscience que ce n’est pas en supprimant ou en changeant le bureau de place qu’on évoluera plus vite.) S’il fallait une autre preuve de cet immobilisme, la lecture du Code Soleil (recueil de tous les textes administratifs concernant l’enseignement primaire) y suffirait. Entre 1929(1ère édition) et 1999, seules deux parties ont disparu : celle concernant les devoirs et droits des membres de l’enseignement public et celle qui présentait la législation de l’enseignement…privé ! On a également débaptisé le Conseil Supérieur de l’Instruction Publique en celui de l’Education Nationale et les Inspecteurs Primaires sont devenus Inspecteurs de l’Education Nationale (IDEN). Rien de plus… Je conseille également la lecture du Dumas utilisé dans tous les Cours Moyens de France pendant des années (J’ai sous les yeux, au moment où j’écris ces lignes, l’édition originale de 1931 : L. Dumas, Le Livre Unique de Français, Hachette Paris 1931). En laissant de coté la présentation, évidemment dépassée et vieillotte, tous les exercices (Lecture ; Grammaire ; Vocabulaire ; Orthographe ; Composition Française) sont contenus dans le même ouvrage et ont pour fondement un seul et même texte. Textes qui pour 108 d’entre eux- sur 120- n’ont aucune « valeur littéraire ». Cela ne rappelle-t-il rien à ceux qui dénoncent les contenus d’apprentissages actuels. 1931…2006…C’était mieux avant ? Non bien sûr ! En près d’un siècle, la « révolution
pédagogique » responsable de TOUS les maux de l’école n’a pas eu
lieu ! Au contraire, l’Ecole reste prisonnière de son Histoire. (Voir également le paragraphe 9 de cette étude) 3- A PROPOS
D’ECHEC SCOLAIRE A quelques exceptions près, les professeurs d’école, de collège et de lycée travaillent ! Beaucoup même, parmi les « instits » s’acharnent, seuls devant le tableau noir avec leurs 27 heures hebdomadaires et leurs 7 disciplines. Tous sont confrontés à des problèmes difficiles dont le plus dramatiquement mal vécu est sans contestation l’échec scolaire. Echec ? Certains réfutent le terme, comme Jean Pierre Chevènement car il met en cause l’école et elle seule estimait l’ancien Ministre de l’Education Nationale. Il lui préférait son contraire, le mot « réussite ». D’autres s’insurgent contre l’infamie du même mot qui relègue aux oubliettes les oubliés du système. Et pourtant… L’échec scolaire est aussi vieux que l’école obligatoire. Il n’a en effet jamais existé d’age d’or de l’enseignement. Les maîtres des années 1960 exerçant devant les classes de fin d’études qui menaient au « certif » témoignent du dressage infligé à leurs élèves pour les mener au jour de l’examen. Voici ce que me disait un vieil instituteur poitevin, aujourd’hui retraité : «Le plus important de l’années, c’était de faire moins de 5 fautes à la dictée du Certificat d’études, parce que 5 fautes, c’était éliminatoire. Quinze jours avant, il n’était pas prêts et 15 jours après, ils avaient quasiment tout oublié ». Quant à ceux qu’on ne présentait même pas au « certif » et qui quittaient l’école à 14 ans sans diplôme, ils sont enfouis dans la chronique enthousiaste des grandes et riches heures de l’Ecole Laïque. L’échec scolaire a aussi une fâcheuse tendance à révéler impitoyablement les inégalités sociales. Sans dire que l’Ecole les crée, force est de constater qu’elle les fortifie. Entre 1978 et 1984 puis entre 2001 et 2005, les chiffres n’ont quasiment pas varié : 93% des enfants de cadres supérieurs et professions libérales ont effectué une scolarité primaire « sans fautes » ; 36% seulement d’enfants d’ouvriers/employés sont dans le même cas. Le profil type de l’élève en échec scolaire est bien connu : fils ou fille d’ouvrier/employé ; père chômeur ; famille monoparentale suite à un divorce ; famille surendettée ; fils ou fille d’immigrés. Dans ces cas là, apprendre à lire, écrire et compter n’est pas ressenti comme une priorité. Les habitudes sélectives se prennent d’ailleurs très tôt puisque 91% des élèves ayant redoublé le CP n’atteindront jamais la seconde. L’échec scolaire a souvent été expliqué, en partie, par les pédiatres (Docteurs Courtecuisse, Vermeil et Guran). Extérieurs à l’institution, ceux-ci n’ont pas été entendus. Leur étude n’a d’ailleurs jamais été publiée ! Il faut dire que leur discours était direct : - la moitié des élèves d’une classe d’age n’atteint pas le baccalauréat - 40% seulement des élèves accèdent à la terminale - le système éducatif porte une large responsabilité de ces échecs - le système éducatif fonctionne en imposant une norme et un rythme auxquels TOUS les élèves doivent s’adapter ou se soumettre - les rythmes biologiques des enfants ne sont pas pris en compte :
Le système éducatif tranche
dans le vif. C’est à 6 ans que l’on trie les « bons » et les
« mauvais ». La lenteur et les retards sont érigés en maladies
chroniques. Voila sans doute pourquoi 1 enfant sur 8 parcourt sans fautes la
totalité du cursus d’enseignement général, du CP au Baccalauréat. 4- « LE NIVEAU BAISSE ! » « Le niveau baisse ! ». Ce cri est devenu le leitmotiv des détracteurs de l’Ecole: parents désespérés parce que mal informés, professeurs aigris se consolant dans la lecture ou l’écriture de pamphlets mensongers, mais très « tendance », inspecteurs irascibles. Même la presse, en particulier télévisuelle, emboîte le pas aux « anti pédagogues ». L’interview de Jean Paul Brighelli sur France 2 par une Françoise Laborde plus que complaisante fut à cet égard révélatrice de l’audience accordée à tous les poncifs véhiculés, dont ce trop fameux « le niveau baisse ! ». Rien de nouveau sous le
soleil pourtant. En 1938, voila ce
qu’écrivaient les collaborateurs de Jean Zay, Ministre de l’Education Nationale du
Front Populaire (assassiné par les nazis avec la complicité de Vichy) : « On constate que la lecture courante n’est pas acquise à 10
ans par la moyenne des élèves. Dans les première et deuxième années du primaire
supérieur (aujourd’hui 6ème et 5ème), nombre d’élèves
n’ont pas la perception rapide et globale des mots et des phrases qui seule
permet une lecture courante et intelligente ». Toujours en 1938, ces propos sont devenus « Instructions du 20 septembre relatives aux arrêtés du 23 mars 1938 » et concernant l’apprentissage de la lecture (Bibliothèque pédagogique EDSCO, Editions scolaires, Chambéry 1950, Edition Originale, page 30) « LECTURE ET RECITATION. – (…) Des constatations faites dans de nombreuses écoles, il
résulte que « la lecture courante » n’est pas complètement
acquise à 10 ans par la moyenne des élèves. (…) Dans la deuxième année du Cours
supérieur et même dans la première année des écoles primaires supérieures, on
voit encore des élèves qui n’ont pas cette perception rapide et globale des
mots et des phrases qui seules, permet une lecture courante intelligente » Enfin, j’ai pris le plaisir de comparer les programmes de Français suivants : - Programmes
et Instructions de l’Enseignement Primaire » en rapport avec l’enseignement du Français : 1923,
1938, 1945, 1946, 1947
ET - Instructions officielles « Cycle des approfondissements Cycle 3, Bulletin Officiel de l’Education Nationale hors série Numéro 1 du 14 février 2002 (Instructions en vigueur actuellement)/Toujours uniquement en ce qui concerne l’enseignement du Français
BOI 14 FEVRIER 2002, page
21 : Objectifs : (…) Le
respect du déroulement chronologique, jalonné par des dates significatives,
y est donc essentiel et constitue l’une des bases de l’approche historique.
Programme : (…) La programmation
(…) doit respecter l’ordre chronologique et ne négliger aucune période,
y compris la plus récente.
Compétences (devant
être acquises en fin de cycle)/Page 23 : Etre capable de distinguer les
grandes périodes historiques, pouvoir les situer CHRONOLOGIQUEMENT (…). Je pourrais encore apporter
bien des preuves, par un travail comparatif, que les programmes actuels et leur
application n’ont strictement rien à envier à ceux de 1947. La crainte de la dégradation de la qualité de
l’enseignement est plus vieille encore que l’Ecole gratuite, laïque et
obligatoire. Ces textes montrent si besoin est à quel point les
« adorateurs » d’un age d’or de l’Education Nationale se trompent et
nous trompent. (J’accuse au passage, à la
lumière de mes propres recherches et à la lumière des recherches présentées
plus avant, tous ces enseignants aigris, véritables révisionnistes du passé,
mensongers sur le présent et uniquement soucieux de leur petite part de « gloire »
au travers de leurs écrits médiocres, de n’agir qu’à des fins politiciennes.) Curieusement, il existe très peu d’études scientifiques sur les niveaux comparés des élèves du début du XXème siècle et d’aujourd’hui. Quelques indications néanmoins : - 1973 : François Ters, Orthographe et vérités, Paris, ESF, 1973 : Celui-ci a comparé les résultats sur une même phrase dictée aux élèves des cours moyens en 1904 et 1965. L’avantage revient à ces derniers. - L’INRP (Institut National de la Recherche Pédagogique) s’est intéressé aux performances en Mathématiques des enfants de cours moyens 1957, 58 et 61 d’une part, 1970, 77, 78 d’autre part, 1997, 98 et 99 enfin. La conclusion est sans appel : « Les enfants savent aussi bien faire des opérations qu’il y a 20, 30 et 50 ans. En géométrie, ils sont très nettement plus performants » - Louis Legrand, Chercheur en Sciences de l’Education, a observé qu’un enfant de 1990 devait en savoir et en assimiler beaucoup plus que son petit camarade de 1900, tout programme comparé. La prétendue « baisse
de niveau » est bien un fantasme engendré par une société inquiète de son
avenir et de son Ecole. Depuis les
années 1975/80, les rumeurs persistantes sur le thème « France, ton
enseignement fout le camp ! » sont véhiculées parallèlement
à la mise en place de la démocratisation de l’Ecole et à la baisse du prestige
social du corps enseignant. Les maîtres ne sont plus les notables considérés
d’avant guerre. Plus grave même, plutôt que d’avouer leurs faiblesses,
pourtant compréhensibles, plutôt que de confronter leurs difficultés pour les
résoudre EN EQUIPES, beaucoup d’enseignants en rejettent la responsabilité
sur leurs élèves ou sur les
Pédagogues dont, il faut le dire et le redire, un nombre infime de propositions
a été effectivement appliqué. En retour, les parents légitimement sensibles à ces difficultés, accusent l’Ecole. Professeurs d’Ecole, Professeurs de collèges et lycées, parents, tous se renvoient la balle, convaincus à la longue que « le niveau baisse ». Longtemps, encore aujourd’hui d’ailleurs, on a cru que ces difficultés d’apprentissage, réelles pour certaines, fantasmées pour d’autres, résultaient d’une querelle de méthodes pédagogiques et qu’une fois l’affaire réglée, on n’en parlerait plus ! Malheureusement aucune lumière n’a jamais jailli des disputes entre tenants de la méthode globale de lecture (jamais appliquée) et tenants de la méthode alphabétique ou syllabique (B-A- BA). 5- « VA FAIRE TES DEVOIRS ! » Bulletin Officiel de l’
Education Nationale No 1, 3 janvier 1957 «Aucun devoir écrit, soit
obligatoire, soit facultatif, ne sera demandé aux élèves hors de la classe.
Cette prescription a un caractère impératif et les Inspecteurs Départementaux
de l’Enseignement du 1er degré sont incités à veiller à son application
stricte ». Malgré cette Instruction officielle toujours en vigueur, les devoirs à la maison, oraux et écrits, restent le lot commun de la quasi-totalité des élèves de l’école primaire. La résistance active d’une majorité de professeurs d’école à une directive vieille de 50 ans a de quoi surprendre. L’intention du Ministère était et reste louable : ne pas surcharger les élèves de travail et ne pas introduire de discrimination entre les enfants « aidés » et ceux qui ne le sont pas. Or depuis un demi-siècle, des générations d’enfants n’ont jamais ressenti le moindre effet d’une semblable intention. D’après une étude de l’ INRP, déjà ancienne (1985) mais toujours d’actualité, quatre constats ont été établis : - 83% des professeurs d’école donnent des devoirs (oraux et écrits), au minimum quatre à cinq fois par semaine, à faire à la maison. 81% des élèves s’en acquittent avec d’autant plus de zèle que leur non exécution n’est pas admise. - Contrairement à ce qui se dit, le travail à la maison n’est absolument pas destiné à compenser les lacunes de tel ou tel élève, ni à rattraper les retards pris en classe puisque 82% des professeurs d’école donnent LE MEME travail à faire à TOUS les élèves de la classe. - Plus l’élève avance dans sa scolarité primaire, plus il doit sacrifier au rituel du travail à la maison. Au CM2, l’enseignant exige des dossiers, des interviews, des rédactions, préfigurant ainsi les devoirs de collège. - Peu d’enseignants du primaire ont une notion claire de la charge de travail infligée aux jeunes élèves. Une demie heure de travail en plus par jour représente cinq heures hebdomadaires supplémentaires, tout cela pour constater que les bons élèves sont…bons, que les élèves moyens sont…moyens et que les élèves en difficulté ont décidément bien des…difficultés. (A noter : nombreux sont
les enseignants qui se plaignent des contraintes imposées par leur IDEN, leur
Conseiller Pédagogique ou leur Maître formateur IUFM. Curieusement, ce sont ces
mêmes enseignants qui se fichent comme d’une guigne de l’Instruction Officielle
du 3 janvier 1957… Comme quoi, quand on veut, on peut…) Mais si les devoirs/maisons résistent aussi bien aux instructions officielles, c’est aussi parce que les parents en redemandent. Ce sont d’ailleurs souvent les parents les moins instruits qui réclament du travail à la maison. Trois raisons à cela : - Ils pensent que les devoirs/maisons permettent de mieux retenir ce qui est appris dans la journée à l’école - Ils espèrent que les devoirs/maisons empêcheront leurs enfants de traîner dans la rue - C’est souvent leur seul lien avec l’école Les devoirs/maisons suscitent donc un double paradoxe. D’une part, ils constituent un facteur de sélection sociale puisque certains enfants ne sont jamais aidés ou ne peuvent pas travailler correctement chez eux. D’autre part, ils sont réclamés par ceux auxquels ils profitent le moins. En revanche, les « milieux aisés » sont plus discrets sur ce chapitre. Très exigeants vis-à-vis de l’Ecole, ils trouvent des subterfuges pour administrer la « pilule vespérale » : « Fais tes devoirs ou je te prive de judo ! ». A défaut, la séance de calcul peut devenir un moment de jeu en famille. Privilège bourgeois que de ne pas avoir tout à apprendre et à attendre de l’ Ecole. L’Ecole est l’univers de bien d’autres paradoxes qui expliquent le précédent : - Les professeurs veulent transformer l’Ecole mais ils refusent de déménager leur classe pour transférer leur cours préparatoire du 2ème étage au rez-de-chaussée parce qu’il est plus facile à des enfants de 6 ans d’accéder de la cour de récréation à leur sale de classe. - Les professeurs d’école vous expliquent en permanence qu’il leur est difficile de s’en sortir seuls mais ils se méfient du travail en équipe et ne veulent voir personne dans leur classe. (Le fait est encore plus remarquable en collège/Le travail en équipe est en revanche souvent exemplaire en ZEP et il donne des résultats) - Toutes et tous trouvent leurs classes trop exiguës mais n’utilisent pas tout l’espace, en sortent encore moins et concentrent leurs activités sur le tableau. Beaucoup de Professeurs, d’école, de collège et de lycée sont avant tout conservateurs. Autant par routine que par conviction profonde. Si la demande de changement est énorme, les classes se suivent et, souvent, se ressemblent. Les devoirs/maisons ont encore de beaux jours devant eux… De l’imagination pédagogique et des innovations naissent le malheur et le scandale, dit on ici et là ! On leur préfère donc un siècle de savoir-faire récrit au goût du jour ! Jusqu’ à l’ennui… 6- DISCOURS SUR LA METHODE Instructions
du 20 juin 1923 relatives au nouveau
plan d’études des Ecoles Primaires Elémentaires (Bibliothèque pédagogique
EDSCO, Editions scolaires, Chambéry 1950, (Edition originale, page 10) : LECTURE : « Nous ne préconisons aucune
méthode : la meilleure sera celle qui donnera les résultats les plus
rapides et les plus solides. Entre la méthode d’épellation et la méthode
syllabique ou la méthode globale, nous ne faisons aucun choix. » Si l’enseignement de l’écriture n’a guère changé à l’exception de l’art et la manière de former les « anglaises », si celui du calcul s’est transformé dans la lettre mais pas dans l’esprit, l’enseignement de la lecture reste l’épicentre des plus violentes polémiques qui ont secoué les 50 dernières années du XXème siècle et les premières années du siècle qui commence. A notre droite, les tenants de la méthode alphabétique qui, pensent ils, a fait ses preuves depuis la IIIème République auprès de ceux qui accédaient à l’instruction. A notre gauche, les tenants de la méthode dite « globale », élaborée par Ovide Decroly. En caricaturant et pour faire court, la méthode alphabétique permet de mémoriser les lettres puis de les combiner entre elles. La méthode globale permet de mémoriser des mots. Dans cette querelle, on retrouve les durs et les mous, les croyants et les athées, plus quelques intégristes fanatiques. Et encore ! Pour le grand public, la querelle n’oppose que deux méthodes. Mais l’affaire se complique singulièrement quand on sait qu’il existe beaucoup d’autres façons d’apprendre à lire ! Une seule chose est sûre : aucune méthode n’a su garantir à 100% la réussite des enfants en lecture. Ceci est d’autant plus vrai que la querelle s’est accompagnée d’imprécations, d’imprécisions, de non-dits, d’interprétations, de mensonges même. N’a-t-on pas accusé la méthode globale de provoquer des troubles de la mémoire et de rendre certains enfants dyslexiques ? On sait aujourd’hui qu’il n’en est rien mais la rumeur a laissé des traces indélébiles. Très récemment, on a même eu le culot d’expliquer les révoltes des banlieues par cette même méthode globale ! Les enfants lisent mal, c’est la faute à Decroly, donc ils brûlent des voitures ! Ah bon ! En 2006, il n’est en tout cas pas un seul maître en France pour prétendre n’utiliser QUE la méthode globale. En revanche, tous ou presque mélangent les genres : un zeste d’alphabétique, trois gouttes de globale et une sauce toute personnelle. Le cocktail fut d’ailleurs officialisé lors d’un colloque organisé en 1979 par Christian Beullac, Ministre de l’Education Nationale. Devant une assistance médusée et regardant le bout de ses chaussures, Colette Chiliand, psycholinguiste, concluait en ces termes : « On ne peut pas
réellement savoir si une méthode est bonne ou mauvaise. Quand le maître qui
l’applique est convaincu, il y a toujours un taux exceptionnel de réussite.
Quand il ne l’est pas, quand il obéit à untel ou untel, à une mode du moment,
c’est l’échec ! » Qu’on se le dise !.... en relisant les instructions officielles de1923 ! 7- PETIT TOUR EN MATERNELLE « Depuis que je suis
enseignante, je me suis très souvent remise en question » ; « Il
est nécessaire d’avoir des idées biodégradables en pédagogie. Il faut se
débarrasser des stéréotypes » ; J’adore inventer des situations
nouvelles pour vois comment vont réagir les enfants » ; « Mes
lectures ? Des livres de pédagogie, de linguistique, de psychologie de
l’enfant, et pas seulement du Dolto… ». Mais quel est ce Professeur d’Ecole qui s’exprime aussi librement, avec autant d’enthousiasme ? Certainement une « mordue » qui ne décrochera plus. Oui mais seulement voila…C’ est une veinarde : elle enseigne en maternelle, la section « chouchoute », l’univers clos, protégé, à l’écart des conflits et du démon de l’échec scolaire. En maternelle, ni examen, ni sanction. De plus, c’est la vitrine de la recherche pédagogique. Bref la maternelle est une oasis, un lieu d’expression et d’épanouissement épargné par les contraintes. Coin-poupées, coin-cuisines, coin-livres…Des images aux couleurs vives accrochées partout aux murs…Un cochon d’Inde dans une cage, la mascotte des enfants…L’énorme calendrier où sont notés les anniversaires…En rouge et en gros caractères le di-manche...Des bouts de moquette de toutes les couleurs où l’on s’assoit pour lire, en puisant à pleines mains dans de grands paniers remplis de livres…Nathalie s’est mise à part ; elle prépare la cuisine des poupées…Tout à l’heure sera « le temps des mamans » où chacune d’elles viendra dans la classe chercher son enfant, en prenant tout le temps qui lui sera nécessaire…C’ est qu’elle a bien changé l’école maternelle. Hier on y exécutait les ordres au sifflet ; aujourd’hui elle est le salon de l’innovation pédagogique, enviée par le monde entier ! Lentement mais sûrement, la scolarisation des tout-petits (2 ans) progresse. Personne ne conteste plus les apports d’une école maternelle vivifiée par les recherches pédagogiques et par l’application de méthodes nouvelles : - elle permet de repérer très tôt les handicaps - elle offre de meilleures chances pour la réussite scolaire ultérieure Il convient néanmoins de nuancer ces indiscutables réussites. L’école maternelle n’efface pas la tare indélébile du système éducatif, à savoir la reproduction des inégalités sociales. Le fils d’ouvrier/employé qui rentre à l’école à trois ans n’a guère d’espoir, statistiquement parlant, de mieux réussir sa scolarité primaire que son camarade fils de cadre, lequel ne l’aura pourtant rejoint qu’en CP. Et la créativité des professeurs d’école en maternelle n’est pas encore pour eux un passeport pour la réussite scolaire. Hélas ! A ce sujet, il est nécessaire de souligner que les professeurs d’école exerçant en maternelle pratiquent un militantisme pédagogique hors du commun. La liste des « charmes » de l’école maternelle, trop longs à énumérer, est le résultat de ces réflexions en commun, de ces permanentes remises en question, de l’ébullition pédagogique qui font envier notre école maternelle partout dans le monde : - Le dialogue parents/enseignants y est plus qu’encouragé. Les parents ont le droit d’entrer dans les classes, de s’attarder avec les autres parents et enseignants - Certains parents mettent la main à la pâte et participent à l’animation de l’école - Les heures d’accueil peuvent être modulées en fonction du rythme des enfants - La sonnerie est très souvent supprimée - Dans les écoles où sont scolarisés les « 2 ans », ceux-ci entrent après les « géants » de 5 ans afin d’éviter les bousculades - L’enfant est astreint au code collectif de vie mais il peut choisir ses activités, avancer à son rythme - L’enseignant est délivré de programmes imposés trop contraignants, des carnets de notes et des devoirs - L’enseignant peut prendre son temps, observer, écouter et attendre tel ou tel bambin. Mais les premiers sombres nuages commencent à s’accumuler au dessus de nos écoles maternelles. On a dit et répété aux parents qu’elles préparaient, qu’elles conditionnaient l’avenir scolaire des enfants. Désormais la maternelle est de plus en plus intégrée dans la stratégie scolaire. (En particulier dans les milieux aisés). Certains vont jusqu’à se persuader qu’intégrer le CP à 5 ans offrira plus de chances à leur progéniture pour « faire » Normale Sup. ou Polytechnique. Les professeurs d’école maternelle font l’objet d’une cour (d’une pression ?) insistante de la part des parents qui souhaitent voir leur enfant savoir lire à 5 ans, voire 4. On veut désormais une maternelle performante, mieux organisée, bref qui « produise » des effets visibles rapidement. Et la maternelle se mue, peu à peu, en antichambre du CP. C’est une erreur formidable ! Mais elle résulte : - de la pression que d’aucuns font peser sur les parents par un discours lamentablement alarmiste et non dépourvu d’arrières pensées politiques. - d’une période incertaine où « avenir » rime souvent avec « chômage ». Il est à craindre que d’autres demandes croissantes pesant sur cette école ne fassent voler en éclats ce qui assurait les belles heures de la maternelle : - la liberté pédagogique - l’inventivité et la prise en compte des innovations pédagogiques - l’absence de contraintes - la prise en compte du développement de l’enfant sanctionnée par son évolution et par elle seule Tout ce qui n’existe plus
en primaire… 8- LES
CHOSES EN FACE Il est vain de vouloir apprécier un tableau global de l’ensemble des professeurs d’école, encore moins à fortiori de l’ensemble du corps enseignant. Il existe d’excellents maîtres, d’autres qui par routine, laisser-aller ou manque de curiosité gèrent leur classe au jour le jour, d’autres encore totalement incompétents. Mais cette simplification est trompeuse. Telle maîtresse adorée de ses élèves peut leur inculquer l’amour de la lecture et faire des fautes d’orthographe ou dire des bêtises au cours d’une séance de sciences ou de technologie. Tel autre maître, tout juste sorti de l’ IUFM, pourra réaliser des prodiges en petite section de maternelle là où une collègue plus confirmée aura échoué, par fatigue, lassitude ou dégoût. Les « profs » travaillent avec plus ou moins de succès, plus ou moins de talent, plus ou moins de bonheur mais l’immense majorité est motivée et conserve cette motivation tout au long de sa carrière. Ce n’est pas le laxisme qui menace l’école primaire mais la médiocrité. La « dérive » de l’ Ecole Publique exprime les fantasmes des nostalgiques de l’ordre et de la discipline d’antan. Le vrai scandale est ailleurs. Il est dans l’impunité où sont maintenus les fauteurs de troubles et dans la manière dont l’institution se fait tacitement complice de l’enseignant. Pour être limogé de l’Education Nationale, il faut y mettre une volonté sans limite ou « déraper » de manière gravissime. (A défaut, on « suspend de cours »…). Le dilettantisme devient alors une denrée difficile à quantifier. Ceci dit, et pour une vingtaine d’ IDEN interrogés, la proportion de « fumistes » invétérés et de « fauteurs de troubles » ne représente qu’ 1 à 2% du total des enseignants. Bien entendu, on peut citer tel ou tel cas pour le moins troublant : (les noms cités ont été changés et sont inventés ; toute ressemblance avec…etc. /les cas sont réels, directement constatés ou rapportés par des personnes de toute bonne foi). - Clémence Picard dicte un texte à ses gamins, le walkman installé sur ses oreilles - Florence Gréau joue au Sudoku ou lit ses magazines préférés pendant que ses élèves sont supposés s’atteler à des exercices de calculs dont elle n’a pas pris la peine d’expliquer les données - Fabrice Dumont s’émerveille devant les dessins de ses élèves. Soit, mais ils recopient le même depuis la rentrée et on est en… février ! - Caroline Frot a trouvé un moyen agréable de « se faire de l’argent de poche » (Je cite) dans cette petite école de campagne, proche de chez elle et du cabinet de son mari chirurgien-dentiste. Elle regarde sa montre toutes les 5 minutes, attendant une récréation qui durera une heure. « Je ne sais jamais quoi leur faire faire » avoue-t-elle ingénument et sans honte aucune. Même s’ils existent et sont
graves, ces « exemples » restent heureusement très rares ! La
désinvolture, le je-m’en-foutisme, l’idéologie sur la base « A bas
l’Ecole bourgeoise ! » ont
peu cours dans l’enseignement, quoi qu’en pensent ses détracteurs. Un chiffre
est tout à l’honneur des professeurs d’école, celui du taux
d’absentéisme : 5,7 %, soit l’un des plus bas, toutes professions
confondues. C’est pourtant l’absentéisme « énorme », dixit
certains parents et autres archaïsants de tout poil, qui sert de premier indice
à la « dégradation » de l’enseignement. On travaille dans les
Ecoles de France et d’Outre Mer. Le
professeur d’ Ecole ne peut échapper à ses élèves : 37 semaines par an,
ils se connaissent, se supportent, s’aiment et se détestent. Rien
n’est plus important que la dimension affective de l’enseignement du premier degré parce que les enfants y sont dans leur plus jeune
age et que la tête de l’enseignant ne change pas toutes les heures. Une classe
de maternelle, de CP ou de CM, c’est aussi une ambiance de travail, de
confiance ou de défiance, de sympathie ou d’inimitiés, d’incompréhensions et de
complicités. Une année scolaire est rythmée par des exercices, certes, mais
AUSSI tissée de mille points de repères entre les gamins et leur maître(sse).
Il n’ y a d’ailleurs rien de contradictoire entre cela et leur obsession
commune : apprendre à lire, écrire et compter. Jean
Pierre Chevènement en son temps, Gilles de Robien plus récemment, n’ont rien
inventé. Ils ont formulé, plus ou moins adroitement, l’une des hantises du
Professeur d’école, comme me l’a dit spontanément cette Institutrice (32 ans)
landaise : « Faire classe, c’est apprendre à lire ».
Hélas on raconte, ici et là, que les Professeurs d’école ont perdu de vue cet
objectif en laissant de coté les apprentissages fondamentaux. Or, TOUTES
les études prouvent que les maîtres passent leur temps, bien au-delà des
horaires officiels, à faire du Français et du Calcul et, plus précisément, de
la lecture et des opérations. Il est néanmoins tout aussi
incontestable que, comme de tout temps, certains professeurs s’en sortent plus
ou moins bien. Isolé dans sa classe, l’enseignant a trop souvent tendance
à se « couper du monde ». Il ne peut pourtant s’abstraire,
contrairement à ce qu’affirme Jean Paul Brighelli par exemple, de
l’environnement de son établissement.
« Faire classe », c’est aussi comprendre pourquoi Mathieu ne
desserre plus les dents depuis 15 jours, pleure près de la fenêtre et s’isole
en récréation. C’est veiller à ce que Julie, dont les parents viennent de
divorcer, quitte bien l’école avec son père (ou avec sa mère) qui en a la
garde. (Se tromper par ignorance peut vous valoir la visite de la Police et des
ennuis très graves, en maternelle en tout cas !). C’est surveiller les
résultas de Mohammed, inexplicablement en chute libre ce trimestre ; c’est
prendre le temps d’expliquer au père de Nassira que les filles ne sont pas
irrémédiablement vouées au mariage à l’age de 11 ans ; c’est se demander
pourquoi Olivier refuse d’ôter son anorak avant de s’apercevoir qu’il a les
bras marqués de traces de brûlures de cigarettes ; en collège, s’isoler du
monde extérieur, sanctuariser à l’extrême l’Ecole dans son ensemble, c’ est ne
pas savoir entendre l’adolescente paniquée qui demande à son professeur ce qu’
elle doit faire après sa première nuit passée sans protection avec son petit
copain. (J’ai personnellement vécu cette situation d’écoute délicate).
Si nous, les enseignants, ne savons pas nous pencher sur ces cas, qui le
fera ? L’ Ecole est aux prises avec des conflits qui ne l’épargnent pas. Les établissements scolaires ne sont pas des Ambassades qui bénéficieraient d’une situation d’exterritorialité. Ils forment une entité, encore trop souvent un monde clos, qui ne peut rester sourd aux échos qui lui parviennent de l’extérieur. 9
-MORCEAUX
CHOISIS Les extraits suivants proviennent tous des Dossiers Documentaires, Numéro spécial de Mars 1966 consacré à l’expression orale et écrite. Ils prouvent :
Aucun
texte n’est postérieur à 1966 ; le dernier date de… 1904 Suggestions méthodologiques : « L’enfant de huit ans garde encore une certaine fraîcheur, une spontanéité qui se manifestent volontiers dans ses premiers écrits. Retrouvez le à onze ans, il n’est capable, le plus souvent, que d’écrire dix lignes cohérentes de banalités impersonnelles » F. Ters, Education Européenne Numéro 34, novembre-décembre 1964 « A voir les résultats qu’il donne souvent, en particulier à l’examen du Certificat d’études, on considère volontiers l’enseignement du français à l’école primaire comme un enseignement décevant, quand il s’agit de l’expression écrite des idées. Les
Instructions Officielles elles-mêmes portent la marque de l’inquiétude que
soulève la médiocrité des résultats généraux dans le domaine de la rédaction.
L’insuccès relatif de cet enseignement est un fait ; les efforts des
maîtres ne sont pas récompensés » R. Brandicourt, L’Enseignement
du français « On ne saurait trop y insister : ce n’est pas le seul professeur de français, ce sont les professeurs de toutes les disciplines qui ont à exercer un contrôle attentif sur les mots et les tours dont use l’élève en parlant et en écrivant » P. Clarac, L’Enseignement du français, PUF Ces conseils nous sont donnés, presque mot pour mot, à chaque rentrée scolaire par nos Chefs d’établissement, comme celui qui suit : « Il
n’y a pas de sujets nobles et de sujets vulgaires, tout sujet est bon pourvu
que les enfants en parlent avec chaleur. Pourquoi, d’ailleurs, ne pas exploiter
leurs connaissances dans d’autres matières ? Nous pouvons puiser largement dans la riche substance que nous offrent l’histoire, la géographie, les sciences naturelles, l’étude du milieu. N’est ce pas le moyen de remédier à cette pauvreté de vocabulaire qui nous désole chez nos enfants ? » L’Education Nationale, Numéro 19, 21 mai 1964 La
langue parlée/Importance de la parole « Nos enfants ne savent plus parler. Tout le monde en est d’accord. Il faut leur apprendre cet art. » La Voix des Parents, Février 1957 Pédagogie de l’élocution « L’impératif de l’éducation, ce n’est pas le silence, mais l’attention, et celle-ci est de meilleure qualité lorsque les enfants prennent une part active au travail commun, parlent, questionnent, répondent. Cette activité ne va pas sans agitation ; il ne faut pas s’en effrayer au point d’exiger des bouches closes et des bras croisés. Il n’est pas vrai que le silence et l’immobilité soient les conditions de l’attention, ce sont les conditions du sommeil. Il faut détruire cette foi aveugle dans la vertu du silence, si préjudiciable, en particulier, au perfectionnement du langage enfantin » G. Villard, L’Expression orale à l’école primaire, Bourrelier 1960 Pédagogie de la rédaction « Pourquoi tant de cours et de discours, surtout dans les petites classes ? Au lieu d’exiger des enfants qu’ils écoutent ou feignent d’écouter, mettons les au travail. Apprenons leur de bonne heure à regarder le monde qui les entoure et à décrire dans une relation sincère ce qu’ils auront su voir ». P. Clarac, L’Enseignement du français, PUF Pédagogie
de la correction « Calculez l’obstacle de façon que l’enfant puisse le franchir ; et ne soulignez pas d’abord toutes les fautes. Peut être faudra t il louer ce qui est bien et négliger le reste, n’en point parler. (…). Il faudrait apprendre à se tromper aussi de bonne humeur. Les gens n’aiment pas penser ; c’est qu’ils ont peur de se tromper. Penser, c’est aller d’erreur en erreur ». Alain, Propos sur l’Education, XXXII, PUF « Oui,
c’est l’enfant qu’il faut corriger, non la copie. Avec notre système de
corriger toutes les fautes d’une copie, la copie devient pour vous une fin. La
copie vous cache l’enfant. Au lieu de chercher en elle un défaut de l’enfant et
de réfléchir aux moyens de corriger cet enfant de ce défaut, vous couvrez cette
copie d’encre rouge. L’enfant s’en moque et il a raison ». J.
Payot, Les idées de M Bourru, Colin 1904
10
- ET
APRES LE BAC ? La jeunesse de notre pays, dans sa grande majorité, a perdu confiance en l’avenir et le progrès social. Les manifestations anti CPE sont révélatrices du malaise d’une jeunesse incomprise, peu soutenue et craintive devant un système de formation inefficace et inégalitaire. L’ascenseur social est « au mieux » en panne, au pire bloqué sur sa fonction « descente » ! Quant aux formations, elles sont souvent inadaptées Tour d’horizon en quelques chiffres : -
2004 : 60% des Français
se déclarent confiants dans leur propre avenir, mais ils ne sont que 34% à
l’être pour leurs enfants -
1975 : 70% des bacheliers
sont assurés de devenir cadres. Ils sont 25% dans le même cas en 2006 -
Entre 1975 et 2000, l’age
moyen de fin d’études a augmenté de trois ans. L’immense majorité des jeunes
entre mieux armée qu’auparavant sur le marché du travail -
Pour autant, 160 000
jeunes quittent l’école sans aucun diplôme du second cycle (BEP/CAP/BAC). -
Parmi eux, 1/3 (soit 8% d’une
génération) ne peut se prévaloir d’aucune qualification. Ces jeunes (mais
pas seulement eux) sont évidemment les premières victimes de la précarisation
et du chômage. -
L’inégalité liée au diplôme
est particulièrement discriminante en France. 5 à 10 ans après la fin de
leurs études, 30% des non diplômés sont chômeurs (17% pour les peu
diplômés ; 6% pour les BAC + …) La France a « oublié » d’accompagner sa jeunesse. C’est criant à l’Université où notre pays investit quatre fois moins que sur ses lycéens. La Suisse, le Danemark, les Etats-Unis, la Norvège, le Royaume-Uni font de leur enseignement supérieur universitaire une priorité. En outre et enfin, nos
jeunes investissent en masse, au nom de la sacro-sainte liberté de choix
universitaire, des filières parfaitement inadaptées aux besoins de l’économie, filières séduisantes certes, mais qui sont donc
autant de culs-de-sac pour ceux qui s’y inscrivent. Citons entre autres la
psychologie, la sociologie, l’histoire de l’art ou le
sport (STAPS). C’est le refus de toute
« orientation » à l’entrée de l’Université qui autorise ces choix,
catastrophiques la plupart du temps pour les étudiants et, à terme, pour la
France. L’un
des enjeux majeurs de la Nation sera d’investir sur sa jeunesse pour remporter
la grande bataille du savoir. Ce sont des décisions politiques courageuses et à
contre-courant de ce qui prévaut depuis des décennies qui permettront la
victoire. L’Ecole
n’est pas sous l’influence, comme certains auteurs veulent nous en persuader,
des pédagogues. J’espère l’avoir ici démontré. Pour autant, après un état des
lieux, il convient de proposer quelques unes des pistes à emprunter de manière
urgente pour améliorer l’Ecole II- Quelques pistes pour améliorer l’Ecole (Le mot « Ecole »
recouvre plus particulièrement ici la maternelle, l’école primaire
et le collège. A un degré moindre le lycée et très peu l’université ou
les grandes écoles) 1-
Peut on diminuer les inégalités sociales à l’école ? : D’après les recherches de Marie Duru-Bellat
(Professeur, Institut de Recherche sur l’Education/IREDU-CNRS Université de Bourgogne) Cette question n’a de sens
que si elle est rapportée aux objectifs que la société fixe à l’école : - s’agit il d’intégrer les jeunes générations pour une socialisation commune et une culture partagée ? - s’agit il de les doter de formations leur permettant de s’insérer dans les places inégales de la société ? Historiquement, l’école a longtemps eu une fonction « intégrative ». Les transformations économiques ont donné plus de poids à cette autre fonction, former pour des places inégales. Ceci modifie fondamentalement la manière dont se pose la question des inégalités. Si, face à des objectifs communs, la visée d’égalité s’impose, il en va tout autrement si c’est l’utilité des formations qui prime. Dans une telle perspective, l’école produit des hiérarchies, des inégalités, même si, méritocratie oblige, elle doit le faire de manière juste.
Les inégalités sociales de « carrière scolaire » sont très fortes en France. Parmi les enfants entrés en 6ème en 1989, 85% des enfants d’enseignants ont obtenu un Baccalauréat général ou technologique contre 23% d’enfants d’inactifs, sachant en outre qu’il ne s’agit pas des mêmes Baccalauréats. Ces inégalités sont évidemment déjà en germe à l’entrée de l’Ecole maternelle. Rien de surprenant dans ces chiffres pour une société dont les familles sont inégales, donc inégal l’environnement dans lequel se développent les enfants. Or dès la première heure, on le sait sans toujours vouloir se l’avouer, le développement culturel de l’enfant est SOCIAL, avec pour conséquence que les pratiques éducatives parentales exercent une très forte influence. Ces « socialisations différenciées » entraînent immanquablement une inégale préparation des enfants à ce qu’exige l’Ecole et des inégalités de développement dans le domaine des connaissances et des compétences. (Voir J Lautrey, Classe sociale, milieu familial, intelligence, Paris, PUF, 2002) L’Ecole maternelle pourtant s’avère bénéfique pour TOUS les enfants, quel que soit le milieu social. Vient ensuite le primaire où le caractère cumulatif des apprentissages est très net. Même si l’effet spécifique du milieu social s’avère ténu sur les progressions, à l’échelle d’une année scolaire, il est intégré au « niveau » de l’élève, niveau qui sera l’ingrédient principal, voire unique, de la progression et de ses conséquences par la suite. Lors du passage dans le
secondaire (entrée en 6ème), l’accumulation des inégalités
s’accélère et pèse de plus de poids. Les élèves initialement les meilleurs
et/ou de milieu social favorisés tirent le meilleur profit des années de
primaire et de la 1ère année de secondaire. On a constaté
qu’en deux ans (5ème/4ème surtout), autant d’inégalités
« socio/scolaires » se créent que pendant TOUTE la scolarité primaire.
A partir du secondaire s’ajoutent
les possibilités de choix d’options ou d’orientation. Les enfants des milieux
populaires visent « forcément » moins haut que leurs camarades de milieux favorisés, y compris à
niveau scolaire égal. Ils se rallient aux conseils, souvent plus prudents, de
leurs enseignants. En fait, ils s’ « auto sélectionnent ». Au total,
il est aujourd’hui démontré que les inégalités sociales de carrière scolaire
s’expliquent pour une part équivalente : - par
les inégalités de réussite académique - par
les inégalités de choix scolaires et d’orientation Les familles se mobilisent par rapport à l’école. Les objectifs poursuivis dépassent la scolarité immédiate pour inclure une visée d’insertion sociale. Il faut donner à son enfant ce que les autres n’ont pas afin de le placer au mieux dans la compétition scolaire. Donc non seulement, comme nous l’avons vu auparavant, les inégalités sociales s’invitent dès le CP mais encore elles interviennent dans la capacité inégale des familles à faire prévaloir leur stratégie d’optimisation dans la carrière scolaire de leur enfant.
Mais la réussite académique et le
déroulement de la carrière scolaire prennent place dans un contexte, un
système, un établissement, une classe. Or la qualité de ce contexte est
variable : on progresse mieux avec certains maîtres, ou dans certains
établissements, ou encore dans certains systèmes scolaires. Ceci est
particulièrement visible et valable pour les élèves les plus en difficultés
(souvent aussi de milieux défavorisés). Améliorer l’efficacité de
l’école, dès lors que ce sont les moins favorisés qui sont les plus sensibles à
son influence, est donc une manière de réduire les inégalités entre élèves et
aussi les inégalités sociales. On sait aussi que face à des publics identiques, certains établissements ou certains maîtres s’avèrent plus efficaces que d’autres et on constate aussi qu’en moyenne, les élèves de milieux populaires fréquentent les contextes les moins efficaces, où se concentrent les enseignants les moins expérimentés, face à un public « difficile ». L’enseignant est alors tenté de s’adapter en abaissant le seuil de ses exigences. (Voir A Van Zanten, L’ Ecole de la Périphérie, PUF 2001). De fait, on progresse évidemment moins dans ces établissements. Les conséquences sont doubles : - les familles les mieux informées perçoivent ces inégalités entre contexte et vont rechercher pour leurs enfants les contextes les plus efficaces - une part de l’avantage dont bénéficient les enfants de milieu favorisé ne s’explique pas par des facteurs individuels mais par le fait qu’ils fréquentent des contextes scolaires plus propices à la réussite. Enfin, le fonctionnement même des classes fabrique et reproduit certaines inégalités sociales (Voir F Dubet et M Duru-Bellat, Qu’est ce qu’une Ecole juste ? Revue Française de Pédagogie, Numéro 246, p 105 à 115, 2004). L’enseignant est un acteur social comme les autres. Il aborde les élèves avec des représentations sociales qui l’incitent à être plus ambitieux avec les élèves appartenant à des milieux où la réussite scolaire apparaît comme une évidence. Quant à l’institution « Ecole », elle fonctionne comme une microsociété, sans échapper aux représentations qui sous-tendent et entretiennent les rapports sociaux. Mais la portée de ce qui s’y passe : - est limitée en amont car elle reçoit des élèves de fait inégaux - est limitée en aval parce qu’elle est instrumentalisée par des acteurs qui l’utilisent au mieux de leurs intérêts, tout cela pour des fins qui la dépassent
Les familles sont impliquées dans l’éducation de l’enfant. Donc, tout un pan de la lutte contre les inégalités sociales passe par une « formation » des parents. Ces programmes de formation existent déjà en Belgique et au Canada où ils ne sont pas dépourvus d’effets mais dont la lourdeur oblige à des actions très ciblées sur les familles en très grandes difficultés, du même coup stigmatisées. On peut leur préférer le développement de structures éducatives de garde pour très jeunes enfants (et parents) en difficultés, sans espérer pour autant s’attaquer aux conditions matérielles de vie de ces familles, conditions matérielles qui affectent aussi la scolarité des enfants. La priorité est de lutter directement contre les inégalités sociales plutôt que de les attaquer indirectement par le biais de l’école. La Suède a réduit POLITIQUEMENT les inégalités face au risque économique par des politiques variées et de long terme. Faut il alors conclure que la réduction des inégalités sociales à l’école ne peut venir que de politiques sociales générales de lutte contre la pauvreté, de l’emploi ou de la ville ? Les comparaisons historiques et internationales invitent à des réponses plus nuancées.
De prime abord, la voie la plus efficace pour démocratiser les carrières scolaires serait d’ouvrir l’accès à l’éducation, de réduire la sélectivité des cursus. En France, la démocratisation est purement « mécanique » : - tous les élèves entrent en 6ème - pratiquement tous parviennent en 3ème - les inégalités sont moins fortes en ce qui concerne l’obtention d’un Baccalauréat Ouvrir le système débouche donc sur une distribution moins inégalitaire de l’éducation et conduit plus de jeunes vers plus de savoirs. Mais l’éducation sert aussi à se classer par rapport aux « concurrents ». Et au fur et à mesure que les scolarités s’allongent, les écarts sociaux se déplacent plus avant en prenant par exemple la forme de l’accès à telle ou telle filière ; c’est la « démocratisation ségrégative » (Voir P Merle, La Démocratisation de l’enseignement, Paris, La Découverte, 2002). En outre, si l’expansion des systèmes éducatifs ne s’accompagne pas d’un déplacement vers le haut de la pyramide des emplois, ce qui est donné d’un coté (accès plus ouvert à l’éducation) se paie de l’autre par une moindre valeur des diplômes. L’examen des politiques d’ouverture montre donc bien qu’il n’est pas aisé, par cette voie, de réduire les inégalités. Celles-ci peuvent évoluer sans que l’école se mobilise. Dans les années 60/70 par exemple, les filles ont rattrapé leur retard de scolarisation sur les garçons parce que le marché du travail offrait aux femmes (instruites) de réelles opportunités alors qu’aucune politique scolaire spécifique n’était mise en place à ce sujet. Mais réciproquement, l’Ecole peut mettre en place des politiques que les stratégies des acteurs vont mettre en échec. Est-ce à dire qu’il n’ y a rien à attendre de réformes visant le cœur du fonctionnement de l’école ?
La réponse est évidemment et
heureusement négative. On peut agir sur certaines caractéristiques. Dans les
pays de l’OCDE, l’ampleur des inégalités sociales est d’autant plus forte qu’on
passe des systèmes entièrement indifférenciés (pays scandinaves ou asiatiques)
aux pays ayant conservé des filières distinctes dès 11, voire 10, ans
(Allemagne ; Luxembourg). Des politiques d’allongement du tronc
commun ou le développement des passerelles entre filières sont susceptibles
d’atténuer les inégalités sociales. On sait aussi aujourd’hui qu’une part importante de l’avantage des jeunes de milieu favorisé passe par l’accès à des établissements de meilleur qualité. Une politique visant à réduire les inégalités sociales doit établir une égalisation de la qualité de l’offre pédagogique et des ressources entre établissements ainsi qu’une uniformisation de leur public via une plus grande mixité sociale. Ceci requiert une discrimination positive rigoureuse pour que les inégalités scolaires ne viennent pas redoubler les inégalités sociales. C’est néanmoins DANS LES CLASSES que se jouent les acquisitions des élèves. Il est nécessaire de laisser l’initiative au terrain A CONDITION, via des programmes nationaux et des évaluations standardisées, de se prémunir des dérives de l’adaptation aux élèves. Ceci est d’autant plus évident qu’aucune étude ne désigne aucune méthode comme dotée d’une efficacité pédagogique intrinsèque. Il FAUT aller vers une attitude plus expérimentale où enseignants ET chercheurs concevront et évalueront les effets précis de tel dispositif sur tel public. Car contrairement aux MENSONGES des pamphlétaires actuels, JAMAIS la recherche pédagogique n’a trouvé toute sa place dans l’Ecole et n’a donc pu exercer la moindre influence. Etudions également de très près le mode de groupement des élèves et la mixité sociale dans les établissements. Les familles aisées, dont les enfants sont en général de bons élèves, ont tout intérêt à être « entre elles » dans des écoles où le climat est propice aux études. Mais l’existence de ces écoles produit inévitablement des écoles et/ou des classes à la tonalité opposée. Or l’hétérogénéité réduit extrêmement peu le niveau de l’élite en augmentant bien plus le niveau des plus faibles. L’Etat devra trancher ces conflits d’intérêt en fonction de l’ INTERET GENERAL, qui maximise les acquis moyens d’une classe d’age. Il ne sera pas aisé, hélas, de convaincre les familles des enfants qui y perdront si peu que ce soit… La question de la réduction des inégalités socio-scolaires est fondamentalement POLITIQUE. Mais cela n’assigne pas à l’impuissance les acteurs qui font vivre l’école. A eux d’accepter l’ouverture, l’auto critique, la modestie parfois 2-
La lutte
contre la violence à l’Ecole : sommes nous condamnés à la démagogie ? D’après les recherches d’Eric Debarbieux (Professeur,
Directeur de l’Observatoire International de la violence scolaire, Université
Victor-Segalen Bordeaux II) La violence à l’école est depuis les années 90 en France un sujet politique. En parler sereinement est difficile et le sujet attire les diatribes antipédagogiques les plus fumeuses. L’école est soit une forteresse assiégée par les sauvages du quartier, soit le jouet des enseignants « soixante-huitards » et d’un supposé laxisme tenant lieu d’explication universelle. Pourtant un savoir positif s’est construit en France et à l’étranger à propos de « ce qui marche » et de « ce qui ne marche pas ».
Commençons par être sérieux : ce qui a retenu l’attention en France (et dans le monde) par l’intermédiaire des médias, ce sont les meurtres de masse survenus dans des écoles américaines, dont le tristement fameux « Massacre de Colombine ». On en conserve l’idée que ces meurtres ont été commis par des jeunes. Or il convient de rappeler que la plupart d’entre eux étaient le fait d’adultes : - Période 1964-2004 - 15 faits criminels (dont 5 aux Etats-Unis) - 177 morts - 128 de ces 177 victimes (70%) ont été tués par des adultes aux motivations très diverses : terrorisme ; idéologie sexiste ; démence - A cela s’ajoute le massacre survenu en Russie en 2004 et dont le bilan exact n’a jamais été publié. On parle de 250 enfants tués par des terroristes lors d’un assaut des forces de l’ordre russes. Cette violence extrême est
heureusement marginale. En revanche, que ce soit en France, en Angleterre, en
Australie ou au Canada, toutes les recherches considèrent que la violence
à l’école est constituée de faits ténus, mais répétitifs et nerveusement
usants, du genre « incivilités », « harcèlements » ou
« micro-violences ». (Denise
Gottfredson, une des meilleures spécialistes mondiales du problème, affirme
après enquêtes que le véritable problème tient à la haute fréquence des
« victimisations mineures » ou « incivilités/indignities en
anglais). Nous sommes très souvent à la marge du délit plus que
dans la délinquance ouverte.
Le simplisme des analyses sur les causes de la violence à l’école serait d’un comique involontaire s’il n’était souvent à vomir. Deux exemples : - « La violence à l’école a une cause : la décadence pédagogique liée au laxisme spontanéiste des pédagogies nouvelles mais aussi des parents, ces parents qui furent élèves en mai 68 et « salis » par sa luxure débridée s’opposant à l’ascétisme nécessaire à la transmission des savoirs, causant une défaite de la pensée ». Risible ! - La métaphore de l’école assiégée : la violence DANS l’école est rabattue sur la violence urbaine, violence d’intrusion, ce qui appelle une stratégie d’enfermement de l’école dans ses murs afin de la protéger des « sauvageons » de quartiers. Affligeant ! Le problème est que c’est beaucoup moins simpliste que cela. La violence d’intrusion représente 2,84% (Chiffre Ministère Education Nationale) de la totalité des faits recensés. (Allons jusqu’à 5% si l’on ajoute les faits avérés mais non déclarés). La violence à l’école est spécifique à ce lieu, elle n’est pas assimilable à une simple violence urbaine. Les résultats de toutes les études à ce sujet sont très clairs : - aucun facteur pris isolément n’est à lui seul explicatif - la « violence » juvénile n’est pas le résultat d’un processus biologique ni d’un processus de socialisation, fut il familial (Voir L Fortin et M Bigras, Les facteurs de risque et les programmes de prévention auprès d’enfants en troubles de comportement, Québec, Behaviora Eastman 1996) En fait, c’est la combinaison de certains facteurs de risques qui peut expliquer ce que l’on appelle la « violence juvénile ». L’étude la plus sérieuse à ce sujet est sans contestation The Cambridge Study in Delinquent Development, Farrington 1997. Celle ci démontre que le pourcentage des jeunes mis en cause pour crime violent passe de 3% de jeunes sans facteurs de risques à 31% de ceux qui combinent les quatre facteurs de risque suivants : - Bas
statut social de la famille - Famille
nombreuse - Faible
coefficient intellectuel - Socialisation
familiale défectueuse La recherche a également démontré clairement que les résultats étaient différents suivant les écoles et le « climat scolaire ». (E Debarbieux, La violence en milieu scolaire-1, Paris, ESF 1996). La pédagogie pratiquée (style coopératif) et le style de gestion de la Direction (participatif) sont des facteurs de protection bien identifiés. Enfin la recherche la plus
impressionnante est celle de Christine Eith, professeur à l’Université du
Delaware (USA). Son échantillon de travail était de 7203 élèves, ce qui est
exceptionnel. Les résultats de son étude sont très clairs : l’existence
des classes de niveau (les « Ability Grouping ») est un facteur
majeur de risques, deux fois plus explicatif que la monoparentalité par
exemple. La ségrégation scolaire est LE danger réel.
Ce qui ne marche pas, c’est
le traitement « extérieur » de la violence scolaire : - La protection matérielle des sites scolaires peut être nécessaire lorsque les problèmes d’intrusion deviennent importants, lorsque toutes les autres solutions ont échoué. Mais elle ne traitera jamais en profondeur le problème. Pire même : elle créera un « effet cible » sur l’école « protégée » conçue alors comme une ennemie avec pour corollaire les violences anti-scolaires : dégradations, agressions contre les biens du personnel, agressions physiques… - La simple présence de la Police ne suffit évidemment pas surtout lorsqu’il s’agit de fouilles de cartables et autres mesures aussi spectaculaires qu’inefficaces. Quant aux apports de la technologie de surveillance (caméras), pourquoi pas mais elles ne constituent pas la panacée Deux études, américaines (USA), ont montré ce qui marchait et ce qui ne marchait pas en terme de lutte contre la violence scolaire. Ces études ont pour avantage de porter sur un très grand nombre de cas : - Travail compilé et traitement de 221 études précédentes : les programmes développés ont montré que sur les 15% des élèves engagés dans une bagarre, 8% ne récidivaient jamais après application d’ un des programmes ci après - Une autre étude, compilé après examen minutieux de 83 études a précisé l’ efficacité des programmes ci après : Interventions
centrées sur l’environnement : Interventions sur l’école et
la gestion de la discipline : Fonctionne
dans tous les cas suivants : Crime/Abus de substances/Comportement
agressif/Décrochage et absentéisme Interventions pour établir des normes ou des attentes : IDEM Gestion de la classe : Fonctionne en cas de crime/Abus de substance/Décrochage et absentéisme Réorganisation des classes : Fonctionne en cas de Comportement agressif/Décrochage et absentéisme Interventions
centrées sur les individus : Entraînement au self-control utilisant des méthodes cognitivo-comportementales : Fonctionne dans tous les cas Entraînement au self control ou à la compétence sociale sans méthodes cognitivo-comportementales : Ne fonctionne pas Interventions cognitivo-comportementales pour modification du comportement : Fonctionne dans les cas de Comportement agressif/Décrochage et absentéisme Conseils, dialogues, travail social et autres interventions thérapeutiques : Ne fonctionne pas Tutorat et soutien scolaire : Fonctionne en cas de Comportement agressif/Décrochage et absentéisme Service communautaire et activités de loisir : Ne fonctionne pas ; prometteur en cas de décrochage et absentéisme Denise C. Gottfredson, immense chercheuse américaine reconnue partout pour la qualité de ses travaux, affirme :
« Les écoles dans
laquelle le corps enseignant et l’administration communiquent et travaillent
ensemble pour planifier le changement et résoudre les problèmes ont des
enseignants avec un meilleur moral et pâtissent de moins de désordre. (…) Les écoles dans lesquelles
les élèves perçoivent des règles claires, des actions valorisantes et des
sanctions sans ambiguïtés bénéficient également de moins d’indisciplines. Les écoles gouvernées par
un système de valeurs partagées et d’attentes quant au comportement, dans
lesquelles des interactions sociales profondes s’établissent et dans lesquelles
les élèves développent un fort sentiment d’appartenance, ont l’impression que
les adultes se soucient d’eux, bénéficient également de moins de
désordre. » (Voir
Gottfredson, P 71, in Sherman et Al., Evidence-based Crime Prevention,
London and New York Routledge 2002) Hélas l’opinion française et les
responsables politiques doutent encore trop de l’efficacité des programmes de
prévention. Pourtant TOUTES les recherches et leurs APPLICATIONS sur le
terrain ont démontré et démontrent leur force. Elles sont fondées sur
l’encouragement et non sur la répression, ce qui ne signifie en aucun cas le
laxisme. Les stratégies purement behavioristes (style « camp de
redressement ») n’ont aucun effet. En revanche, dans les cas les plus
« lourds », un encadrement strict (militaire ou autre, là n’est pas
le problème) ACCOMPAGNE d’un travail éducatif et culturel avec projet porte
TOUJOURS des fruits.
Il serait bon que les Politiques offrent les moyens aux chercheurs ET aux enseignants, ainsi qu’aux institutions associées, pour que ces programmes ne soient plus seulement des expériences ou des « objets » de recherches universitaires. Citons Egide Royer lors de la première conférence mondiale sur la violence à l’école (Voir citation dans E Debarbieux et C Blaya, Violences à l’école et Politiques publiques, Paris, ESF 2001) « Nous savons énormément
de choses sur la violence à l’école et sur les conditions d’efficacité des programmes, mais la redescente de
ces informations sur le terrain n’a pas suivi la montée du problème. C’est
d’abord une question de formation des enseignants, mais sans doute aussi de
socialisation professionnelle. Il ne s’agit pas de trouver des programmes
efficaces…mais de les accepter. »…puis de les appliquer ! (Note de
l’auteur) Ces problèmes de comportement et la recherche de leurs solutions ne doivent pas être considérés comme une charge supplémentaire au travail des enseignants mais comme une partie intégrante de celui-ci. Ceci implique des changements de perspectives dans la définition des charges d’enseignement, dans la formation des enseignants, dans l’aide aux enseignants, dans l’évaluation des enseignants. Une telle redéfinition de la politique de la formation se heurte souvent : - à l’irresponsabilité des élus/décideurs - aux syndicats - à une partie des enseignants eux-mêmes - aux anti pédagogistes La simple existence d’une formation des enseignants du secondaire hors de la discipline qui les définit (Français/Maths/Langues/Etc.) est sans cesse remise en cause. En fait, dans la plupart des lieux de formation des enseignants, on apprend surtout à ne pas travailler en équipe et à ne pas prendre au sérieux la pédagogie. Le combat contre la violence à l’école est aussi un combat politique, un combat contre la démagogie. 3-
Quand les
parents choisissent l’Ecole.
D’après les recherches de Christian Maroy, Professeur, GIRSEF (Groupe inter
facultaire de recherche sur les systèmes d’éducation et de formation),
Université de Louvain, Belgique Rappelons tout d’abord que la France a adopté une « carte scolaire », c'est-à-dire que le lieu de résidence de l’élève définit l’école publique dans laquelle il va être scolarisé. En Belgique, le choix est laissé aux parents ET aux établissements. Mais depuis une décennie, les politiques éducatives de nombreux pays évoluent : - Australie ; Angleterre ; Nouvelle Zélande : des logiques de « quasi marchés » se substituent à l’encadrement de l’Etat - France ; Portugal ; Finlande ; Suède : Assouplissement des politiques de « zonages » ou de « sectorisations ». Des auteurs et politiciens néo libéraux ont donc promu un régime de « quasi marchés » qui combine le libre choix avec davantage d’autonomie des établissements scolaires et un financement public lié au nombre d’élèves. Les effets positifs supposés de ce « marché scolaire » sont largement discutés aujourd’hui : - Tous les « consommateurs d’école » sont loin d’être égaux - Le libre choix favorise principalement les classes moyennes - Ce système substitue à la valorisation d’une éducation humaniste et égalitaire la promotion de la rationalité instrumentale et de la compétition. - Le « marché » accentue la ségrégation scolaire et la hiérarchisation des écoles
La promotion du libre choix comme facteur d’amélioration du système scolaire a particulièrement été défendue par Chubb et Moe dès 1980 (Repris dans Education, Culture Economy, Society Oxford University Press 1997). Leur argumentation se résume en trois points - Il
faut changer le système institutionnel de « contrôle » des écoles
pour promouvoir des pratiques favorables à l’efficacité - Si
les écoles (américaines) sont de qualité « moyenne », c’est en raison
d’un système de régulation fondé sur un contrôle politique et bureaucratique
qui limite leur autonomie. Il en résulterait u manque de cohérence dans les
buts à atteindre, un faible leadership des directions - A
l’opposé, le système fondé sur le marché favoriserait l’émergence de
caractéristiques pédagogiques favorables à l’efficacité scolaire. Dans un tel
système, les écoles disposeraient d’une autonomie tout en étant indirectement
contrôlées par la société via le marché. Chubb et Moe appuient leur théorie sur une comparaison Ecoles Publiques/Ecoles Privées (aux Etats-Unis). Les meilleurs résultats de ces dernières seraient liés à une autonomie plus grande, un moindre contrôle politique, une régulation du marché. Les effets positifs de la mise en place d’un système de marché vont être très largement controversés au fur et à mesure que les politiques publiques les développeront fin 1980, surtout dans les pays anglo-saxons comme l’Angleterre (1998), la Nouvelle-Zélande (1991) et l’Australie.
La première critique du système de « marché » porte sur le choix de l’école : seules certaines familles sont en mesure d’exercer ce choix. Celui-ci est très largement sous-tendu par les conditions matérielles et culturelles dans lesquelles vivent les familles. On distingue deux groupes : - Les parents issus des classes populaires, impliqués dans un écheveau de contraintes matérielles et culturelles (Travail/Distance perçue de l’école/Organisation familiale) qui aboutissent à des « choix » locaux - Les parents des classes moyennes, plus libérées de ces contraintes, s’engagent dans le marché scolaire de manière stratégique, prenant en compte un horizon plus long et davantage de considérations éducatives. La promotion du
« marché » en matière scolaire est bien une politique de classe. (Voir les recherches d’Agnès Van Zanten à ce sujet et S Gewirtz, J Ball et R Bowe, Markets, Choice and Equity in Education, Buckingham and Philadelphia, Open University Press 1995) La seconde critique montre que les politiques favorisant le « marché scolaire » affectent les valeurs et les conceptions éducatives des professionnels de l’enseignement. Au sujet des chefs d’établissement, les Etats-Unis ont parfaitement identifié et étudié les manières de fonctionner des « Welfarist headmaster » et des « managers ». - Le « Welfarist » est le Fonctionnaire de l’Etat, mû par la recherche de l’intérêt général, une logique de décision imprégnée de valeurs professionnelles « humanistes » (Egalité des chances, Equité, « Care »), le respect des relations collectives de travail et des organisations syndicales, la coopération (participative) des enseignants et le fait d’avoir été socialisé aux valeurs spécifiques du champ de l’éducation - Le « Manager » est orienté par la « satisfaction du client ». Leurs décisions sont prises en fonction d’une recherche d’efficacité. Ils valorisent les relations professionnelles individuelles et les techniques de gestion de ressources humaines. Ils sont plutôt directifs (relativement sourds au dialogue). Enfin ils valorisent la compétition et ont été socialisés aux valeurs du « management » plutôt qu’à celles du champ scolaire. Dans TOUS les cas étudiés par S. Gewirtz aux USA, la montée de la logique marchande et « managerielle » est sensible très rapidement après l’ouverture de ces écoles. Enfin, les préoccupations professionnelles des enseignants dans ces établissements entrent très vite en conflit (larvé et/ou ouvert) avec les attentes de « performativité » promues par les politiques scolaires néo-libérales. (Voir S.J. Ball, Journal of Education Policy, 2003) La troisième critique concerne l’aggravation des risques de ségrégation scolaire. V Vandenberghe (Reflets et Perspectives de la Vie économique, 1998) a démontré (pour la Belgique) que plus la diversité de l’offre scolaire est importante, plus le choix accentue la ségrégation. En fait, en Belgique, en Angleterre, aux Etats-Unis, l’introduction de politiques de « financement à l’élève » (Open enrolment) ou la publication (pour utilisation) d’indicateurs de performance standardisés produisent des effets négatifs et une spirale du déclin pour les écoles peu favorisées socialement et scolairement. Ces dernières perdent peu à peu leurs élèves les « meilleurs », puis toute crédibilité. A l’inverse les écoles « favorisées » le sont de plus en plus, jusqu’à filtrer leur clientèle sur le plan ethnique. (Voir la très probante étude de Lauder et Hugues, Trading in Futures. Why Markets in Education Don’t Work, Buckingham and Philadelphia, Open University Press, 1999. Celle-ci parvient aux conclusions suivantes : - Le choix d’aller hors de sa zone est plus fréquent parmi les catégories les plus aisées de cette zone - La ségrégation sociale entre écoles s’est accentuée plus que ne le laissait prévoir la ségrégation résidentielle.) C’est la Belgique qui a le plus progressé sur ce sujet. Les « politiques » travaillent sur la notion de « bassin scolaire » dans lesquels différents « réseaux d’enseignement » publics et privés s’accorderaient sur diverses normes institutionnelles de fonctionnement (en matière d’inscription ou d’offre scolaire) pour lutter contre la ségrégation et en faveur de l’égalité et de l’efficacité scolaire. Une instance inter réseaux de bassin scolaire déciderait de l’école à laquelle l’élève serait affecté, en fonction des préférences des parents, des places disponibles et des critères communément reconnus et acceptés par tous les réseaux si l’école est « sur-demandée ». 4-
Comment les enseignants et les élèves font-ils pour vivre ensemble ? D’après
les recherches d’Anne Barrère, Professeur, PROFEOR (Interactions professions,
éducation et orientation), Université Lille III La relation Professeur/Elève est CENTRALE dans la vie quotidienne de l’institution scolaire. (Rappelons qu’un enfant scolarisé passe plus de temps par jour avec ses professeurs qu’avec ses parents.) : - Pour l’élève, être bien traité et bien considéré par l’enseignant est une composante majeure de l’expérience scolaire ; en même temps, éprouver l’indifférence ou le mépris enseignant est à la fois banal et potentiellement redoutable. - Pour l’enseignant, le contact avec les élèves est décrit comme la plus grande difficulté ET comme une des plus grandes satisfactions du métier. Des travaux récents ont mis en miroir les deux cotés de la relation pédagogique. (Voir Anne Barrère, Travailler à l’école, Rennes, PUR, 2001). Cette recherche s’est concentrée - sur les transformations du cadre institutionnel des relations Professeur/Elève : - sur l’importance que prennent le verdict scolaire et l’évaluation - sur les accords et tensions entre cultures scolaires et cultures juvéniles.
Les relations entre enseignants et élèves dans l’espace scolaire ne peuvent se comprendre que dans leur cadre institutionnel, affecté récemment de deux grandes transformations : - la
massification, en allongeant le temps moyen de formation initiale, conduit les
élèves à fréquenter les enseignants plus longtemps autour d’enjeux importants,
le classement scolaire ayant un poids décisif dans les trajectoires
ultérieures. - la remise en question d’une distance et même d’une méfiance historiquement construites de l’enfance et de l’adolescence, dans l’institution scolaire. Cette distance n’a certes pas disparu mais s’est affaiblie depuis les années 1970 au fur et à mesure que l’école était considérée comme un « lieu de vie » et que l’adolescent était mis au centre du système, comme l’indique la Loi d’orientation de 1989. D’une relation pédagogique définie par son impersonnalité, structurée uniquement par le savoir et des normes de comportement bien plus que par l’attention à l’enfant, on est passé à la volonté de voir l’élève s’épanouir et/ou s’exprimer à l’école tout autant que de le voir apprendre et obéir. Pour enseigner : - il
faut comprendre, motiver, encourager et sanctionner l’élève/L’enseignant
doit LUI AUSSI se faire comprendre de l’élève - il
faut connaître des éléments de sa vie en dehors de l’école - il
faut rompre avec le cours magistral et encourager la participation et
l’activité des élèves dans la classe, en particulier les inciter à pratiquer
l’ « écriture réfléchie » pour rompre le spontanéisme des SMS ou des
« blogs » Elèves et enseignants se défient moins qu’auparavant des affinités ou de l’affectivité. Dans ses Mémoires, Simone de Beauvoir raconte comment, enseignante en lycée, elle avait adressé un petit geste d’amitié à un élève, geste qui lui était apparu totalement transgressif ! Aujourd’hui, le cadre de cette relation Enseignants/Enseignés s’élargit à l’occasion de voyages, de projets interdisciplinaires, de rencontres. C’est là un but éducatif à part entière dans les établissements dont la communauté doit être chaleureuse et « civique ». (Voir JL Derouet, Ecole et Justice, Métaillé 1992). Pourtant ce mouvement est moins fort en France qu’ailleurs en Europe, notamment au Danemark et en Angleterre. Néanmoins les différentes études menées en France, par P. Rayou par exemple (La Cité des Lycéens, L’Harmattan, Paris 1999), notent une réticence des élèves à entrer trop personnellement dans le jeu scolaire, y compris dans la relation avec les adultes, sans doute pour préserver son quant-à-soi juvénile mais aussi, tout simplement, pour éloigner du regard des adultes leurs amours, leurs amitiés, leur manière de s’habiller… Quant aux enseignants, ils s’interrogent sur leur identité professionnelle qu’ils définissent : - par opposition aux risque d’être transformés en « travailleurs sociaux » dans le cadre d’une relation trop dégagée des apprentissages - par esprit de protection face à une trop grande affectivité relationnelle qui entrerait en tension avec les exigences de justice scolaire Mais pour la majorité des enseignants, il faut le dire, le cours satisfaisant est avant tout celui où les relations ont été paisibles et coopératives, au-delà même des résultats probables.
Il est entendu que la relation Enseignants/Enseignés est conditionnée par la réussite scolaire des élèves. Les « mauvais élèves » manifestent une agressivité impuissante à l’encontre des professeurs qui n’est en fait qu’une contestation impuissante de leur place scolaire, que cette contestation provienne de la mauvaise réputation de l’établissement ou du rang qu’ils y occupent. De la contestation à la violence, il n’ y a qu’un pas comme le démontrent de nombreuses recherches : la problématique de l’échec (au sens large) et celle de la violence (au sens large) sont intimement liées. Même les phénomènes éloignés des enjeux scolaires, comme le racket, sont plus fréquents dans les classes de niveau et, évidemment, dans les classes du niveau le plus « bas ». L’évaluation scolaire est donc porteuse de tensions potentielles. Ce qui ne signifie en aucun cas qu’il faille la supprimer mais, l’ aborder autrement, l’ utiliser autrement, l’ expliquer et la justifier seraient certainement une «valeur ajoutée », aussi bien pour les « bons » que pour les « mauvais » élèves d’ailleurs. Au lieu de ça, le « rabaissement scolaire » est encore trop souvent utilisé : - passage au tableau vécu par le couple Prof/Elève comme un moment de punition, punition d’autant plus humiliante pour l’élève qu’il la vit devant ses pairs. - utilisation de sobriquets divers - rendu de copies classées en ordre décroissant avec commentaires à caractère vexatoire (Grand « classique ») - appréciations humiliantes dans les bulletins - confusions des registres entre jugement sur le travail et jugement sur la personne. (Voir l’excellent ouvrage de P Merle, L’élève humilié. L’école, un espace de non-droit ? Paris, PUF 2005) Le jugement scolaire est porteur d’enjeux relationnels d’autant plus délicats qu’il est dénié : - par l’élève d’abord, qui fait semblant d’y être indifférent ou en rajoute dans l’ostentation de la « nullité » scolaire, même si cette mise en scène cache qu’il se sent très responsable de ses résultats scolaires. - par
l’enseignant ensuite qui trouve l’élève trop consommateur, trop
« comptable », calculant sa moyenne à la décimale près, laissant de
coté des matières peu « rentables » au brevet ou au BAC. (Mais
les élèves n’ont-ils pas été initiés en amont depuis la 6ème,
parfois avant, à ces « savants » calculs ?). - Et le malentendu est à son comble lorsqu’on s’aperçoit que les élèves trouvent eux aussi les enseignants trop « instrumentaux », leur reprochant de ne les juger qu’au travers de leurs notes et leurs résultats généraux. Donc en fait l’élève en appelle au RESPECT MUTUEL, conçu à la fois comme un critère de justice et comme une manière de le reconnaître dans sa différence et son authenticité d’adolescent. (Voir F Dubet, L’Egalité et le Mérite dans l’Ecole Démocratique, Année sociologique 2000, Numéro 50, Pages 383 à 409). Lorsque c’est le cas, mauvaises performances scolaires et bonnes relations peuvent coïncider. L’idéal serait de placer sur le même plan relations positives et exigences en termes d’apprentissages.
Pour vivre ensemble, enseignants et élèves doivent gérer, dans les collèges et lycées, l’arrivée d’une culture juvénile de plus en plus légitime, en phase avec des technologies et des références propres à un univers médiatique qui se développent indépendamment de l’univers scolaire. (Voir à ce sujet D Pasquier, Cultures lycéennes, revue AUTREMENT, 2005). L’enfance est d’abord créative et ludique ; l’adolescence l’est aussi, MAIS les aspects «énergétiques et transgressifs s’y ajoutent. Les « jeux » de langage des adolescents, obscènes et/ou provocateurs, en particulier sur les thèmes les plus dérangeants pour l’institution (Ethnicité, sexualité et racisme/antisémitisme) visent à déranger les tabous adultes. Peu à peu, ils deviennent un système de communication avec ses codes, ses plaisanteries, ses fausses injures, ses automatismes langagiers. Par ailleurs, le « groupe adolescent » est le troisième larron de la relation pédagogique. Selon qu’il est opposant ou adhérent à l’école, il exclura, dans le premier cas le « collaborateur », dans le second le « nul ». Au milieu de tout cela , l’enseignant, souvent critique des médias, rétif à l’éphémère des modes, soucieux d’un langage normalisé jugent les élèves incapables d’opinion personnelle, c'est-à-dire dans la définition légitime de l’institution, éclairée par des connaissances et des « bons » auteurs. Pourtant certains professeurs n’hésitent pas à jouer de ces codes en feignant de s’approprier les codes juvéniles pour réduire les distances et amener une classe à s’investir dans des conventions plus classiques. Ils parlent souvent de ce travail de motivation où il s’agit d’exploiter des éléments proches de la culture juvénile : films, textes de chansons par exemple. La chose n’est pas facile car très rapidement montrée du doigt par les collègues, dénoncée par les « traditionalistes », caricaturée par les médias. Or une pédagogie démocratisante ne doit elle pas passer par l’utilisation des supports quotidiens de la jeunesse pour les amener vers autre chose évidemment, pour développer leur esprit critique, bref pour peu à peu les inciter à partager d’autres supports dont ils sauront apprécier les qualités et les défauts ? Amener ses élèves à apprécier Villon, Hugo ou Aragon en passant par des textes de rap est il dévalorisant pour un professeur ? Evidement pas. En rendant impraticables les « bonnes relations », l’enseignant doit alors faire face une multiplication d’incidents qui le coupent d’une source importante de satisfaction et de motivation professionnelles en même temps qu’elle hypothèque le cœur de la transmission pédagogique. Trois compétences relationnelles apparaissent aujourd’hui fondamentales pour l’enseignant : - la capacité d’interpréter les langages et codes de conduite des adolescents. (ce qui n’empêche nullement de les corriger) - le tact qui permet de comprendre le contexte exact du jugement scolaire que l’on porte 5- Les quatre conditions pour la maîtrise d’un socle
commun par tous. D’après les travaux
de Claude Thélot, Conseiller
maître à la Cour des Comptes, ancien Président de la Commission du débat sur
l’avenir de l’école Le
travail de Claude Thélot et de son équipe étant bien connu, je me contenterai
d’en rappeler ici les grandes orientations. Il est souhaitable que les
préconisations de cette Commission puissent être approfondies pour une mise en
place progressive, mais rapide. L’idée de socle commun n’est pas
nouvelle mais la Commission présidée par Claude Thélot, à la demande de Jean
Pierre Raffarin, l’avait mise au centre de ses préoccupations en insistant sur
la nécessaire maîtrise par TOUS les élèves d’un « socle commun de
connaissances, de compétences et des règles de comportements indispensables ».
C’était et cela reste une noble et grande ambition (La nouvelle Loi votée en 2005 par le Parlement français dispose dans son article 9 de ce que le socle doit contenir). Rappelons d’abord les 8 programmes d’actions définis dans le « rapport Thélot » pour permettre la réussite de tous les élèves : - La
scolarité obligatoire : chaque élève devra maîtriser le socle commun des
indispensables pour trouver la voie de sa réussite - Repenser
la définition et l’équilibre des voies de formation au lycée - Aider
les élèves à construire un projet éclairé et le respecter le mieux possible. - Favoriser
la mixité sociale sur tout le territoire - Renforcer
la capacité d’actions et la responsabilité des établissements scolaires - Redéfinir
le métier d’enseignant (Suivi des élèves/Relations avec les parents/Travail en
équipes…) - Construire
une éducation concertée avec les parents - Former
avec des partenaires (les communes ; les services médicaux et
sociaux ; les entreprises, les associations) Quatre conditions sont absolument nécessaires à la maîtrise du socle commun : 1- Définir un socle opérationnel : pour le moment, cette définition n’existe pas car le Ministère de l’Education Nationale semble craindre les réactions des représentants des matières qui n’en feraient pas partie (sur la base d’ailleurs d’un malentendu dramatiquement stupide et dommageable) 2- Mettre en œuvre une personnalisation des apprentissages :
Chaque élève devrait pouvoir progresser de façon différenciée,
personnalisée. Or pour cela il faut revoir la formation des enseignants de
manière profonde. Pour le moment, rien n’est fait car non prévu par la Loi 3- Diversifier fortement les moyens d’enseignement au sein des écoles primaires et des collèges : Il faut OFFICIELLEMENT reconnaître que la réussite éducative est diversement difficile à atteindre selon l’environnement des écoles et des collèges. Il faut donc mettre en place une très forte diversification qualitative et quantitative des moyens d’enseignement. 4- Etablir les conditions de passage d’un cycle à l’autre : Seuls les élèves maîtrisant les compétences et savoirs du socle commun intègreront le CYCLE suivant. Cette condition devra être annoncée et répétée dès les rentrées successives composant chaque cycle : Primaire/Secondaire (Collège/Lycée). Ces avertissements ne seront efficaces qu’à la condition d’être accompagnés de diagnostics individuels permettant de passer très rapidement aux remédiations nécessaires. Pour cela, il faudra former les enseignants et leur donner des moyens d’actions. Pour
rappel : ces quatre conditions sont, soit trop timidement présentes,
soit totalement absentes de la Loi votée au printemps 2005. Le mot « réussite
pour tous les élèves » a bien été repris, MAIS la « chose »
n’existe pas dans les faits sur le terrain. Pour le moment, l’engagement de
la Nation envers sa jeunesse n’est pas tenu 5-
Quelle pédagogie
pour les élèves en difficultés scolaires ? D’après les travaux de Marcel Crahay, Professeur,
Développement, apprentissage et intervention en situations scolaires,
Université de Genève et Université de Liège La synthèse de TOUTES les recherches, notamment américaines (Etats-Unis) mais pas seulement, démontrent que le redoublement a fait la preuve de sa totale inefficacité. (Voir les travaux de Jackson, Review of Educational Research, 1975 et S.R. Jimmerson, Meta-analysis of grade retention for practice in the 21st century, School Psychology Review, 2001, Numéro 30-3 pages 420 à 437). En France, il existe peu d’études comparables. Signalons néanmoins deux enquêtes très détaillées : Suisse : G. Bless, P. Bonvin, M. Schüpbach, Le redoublement scolaire : ses déterminants, son efficacité, ses conséquences, Berne Haupt, 2005 France : T. Troncin, Le redoublement : radiographie d’une décision à la recherche de sa légitimité. Thèse de Doctorat non publiée, Université de Dijon, 2006 Toutes ces études parviennent aux mêmes constats et conclusions : les élèves faibles qui redoublent progressent moins que les élèves faibles qui sont promus. Quant aux élèves « prometteurs » qui redoublent pour « mieux rebondir », le risque de décrochage et les échecs sont majoritairement constatés. Il est donc impératif de chercher d’autres moyens d’actions comme par exemple la composition et gestion des groupes ainsi que les dispositifs d’individualisation. Beaucoup d’enseignants sont convaincus que le composition et la taille des classes constituent des déterminants de l’efficacité pédagogique. Celle-ci pourrait s’accroître, pensent-ils, face à des classes homogènes de faible effectif. Alors, composition des classes ? Effectif réduit ? Organisation de « groupes de besoin » ?
L’idée sous-jacente à la composition de classes homogènes se décompose comme suit : - le professeur peut aisément trouver des activités d’apprentissages - le professeur peut aisément trouver un rythme d’apprentissage convenable à tous - le professeur n’ira jamais trop vite ou trop lentement comme dans une classe hétérogène : trop vite pour les plus faibles ; trop lentement pour les plus forts Qu’en est il dans la réalité ? La constitution de classes homogènes a des effets préjudiciables sur le plan socio affectif, et ceci pour les élèves placés dans les groupes les plus faibles. Par ailleurs, il s’avère que les enseignants exerçant dans les classes les plus faibles ont tendance à adopter majoritairement une attitude fataliste. L’enseignement reçu dans les groupes faibles est le plus souvent de moindre qualité (Temps alloué à l’enseignement réduit ; nombre moindre d’unités de contenus enseignées ; encouragements plus rares ; exercices de répétition beaucoup plus nombreux). (Voir V. Dupriez et H. Draelants, Classes homogènes versus classes hétérogènes. Les apports de la recherche à l’analyse de la problématique, Revue Française de Pédagogie 2004, Numéro 148, Pages 145 à 165 et l’ étude sur le même sujet menée par Duru-Bellat et Mingat en 1997). La conclusion majeure de TOUTES les études est la suivante : les élèves forts ne souffrent jamais de la présence d’élèves faibles ; les élèves faibles bénéficient de la présence d’élèves forts.
Toutes les études, notamment américaines (Etats-Unis) montrent que la réduction du nombre d’élèves par classe favorise tous les élèves, faibles et forts. Mais ceci à une condition : que cet effectif soit d’un maximum de 10 élèves, ce qui ne peut se faire à l’heure actuelle en France de manière généralisée, mais est possible de manière ponctuelle et ciblée. Il est prouvé que retirer 5 élèves sur un effectif de 25 n’aura aucun effet ; en revanche, retirer 5 élèves sur un effectif de 15 est porteur d’excellents résultats. (Voir School Class Size de Glass, Cahen, Smith et Filby paru en 1982). Les recherches menées au
Etats-Unis (et en France notamment par Piketty) l’ont été de la manière
suivante : les élèves ont été affectés de manière aléatoire dans des
classes à effectif réduit ou dans des classes à effectif plus nombreux. Les
chercheurs ont ensuite vérifié que les élèves composant les deux types de
classes présentaient des caractéristiques comparables du point de vue de
l’ethnie, du sexe et du statut socio professionnel des parents. Les
résultats des élèves des deux groupes ont été comparés à des moments différents
de leur scolarité et à travers des indicateurs diversifiés : tous
confirment l’intérêt des classes à effectif réduit (10 ou moins de 10 élèves/Jamais moins de 8).
L’idée de « groupes de besoin » n’est pas nouvelle. Claparède la préconisait en…1920. Aux Etats-Unis, dans le cadre beaucoup plus récent du plan Joplin, les élèves sont attachés en fonction de leur age à une classe hétérogène. Ils la quittent pour certains apprentissages (Lecture et mathématiques principalement) qui se déroulent en groupes homogènes. Cet assouplissement respecte à la lettre trois règles immuables : - le
temps passé en groupes homogènes est nettement inférieur au temps passé en
classes hétérogènes, ce qui a pour conséquence que le groupe auquel les
enfants s’identifient reste ce dernier - la
constitution des groupes homogènes repose sur l’évaluation d’une compétence
spécifique et non plus sur celle d’une aptitude générale - les
groupes sont flexibles ; en fonction des progrès des élèves, ils
peuvent être réorganisés Le plan Joplin a fait l’objet de plusieurs évaluations : - l’effet positif est particulièrement sensible pour les élèves faibles, sans affecter le niveau des élèves forts - les résultats en lecture des élèves du programme Joplin sont nettement supérieurs à ceux des élèves fréquentant des classes « traditionnelles ». - aucune étude d’évaluation n’a abouti à des résultats négatifs à propos du plan Joplin Il est donc nécessaire, puisque cela « marche », de constituer des classes hétérogènes à petits effectifs, surtout dans les premières années de l’école primaire, déterminantes pour l’avenir. Sur cette unité de base, il sera utile de greffer un fonctionnement par groupes de besoin en respectant les trois règles énoncées ci-dessus. 6-
Rendre la vie
professionnelle plus attractive (D’après le
livre cité ci-dessous) Marie Duru-Bellat le dit avec justesse dans son livre, L’Inflation Scolaire, Seuil, Paris 2006, Page 97 : « Aujourd’hui, l’école s’efforce de tout faire : trier les plus méritants, mais aussi doter une fois pour toutes les jeunes des compétences requises dans une vie professionnelle DONT ELLE RESTE LARGEMENT COUPEE. C’est sans doute trop : comment nier qu’il y a mille choses qu’on apprendrait mieux ailleurs ? » Mais dans une société avant tout méritocratique, on comprend les résistances corporatistes du milieu scolaire pour conserver le monopole de la certification. Il est pourtant URGENT que l’Ecole, au sens le plus large, soit plus modeste et plus curieuse, qu’elle s’intéresse au « continent méconnu » des salariés et des professionnels, « continent » où l’on trouve AUSSI de l’intelligence, des expériences et des pratiques justes. Il n’est plus possible aujourd’hui, pour l’enseignant, de se draper dans sa seule pureté académique (Voir F. Dubet et M. Duru-Bellat, L’Hypocrisie scolaire, Seuil, Paris 2000) sans pour autant limiter la formation à ce qui serait jugé utile et apprécié sur le marché du travail. Cet équilibre, difficile certes, doit pourtant être recherché et trouvé. Car pour le moment : - l’insertion
des jeunes échappe largement à l’emprise de l’Ecole - l’Ecole
n’est responsable ni de la
répartition des emplois, ni de l’évolution des compétences dans le monde
professionnel - l’Ecole
ne peut éluder sa responsabilité dans l’orientation progressive des jeunes,
débouché normal de son action éducative Responsabilité qui lui semblerait moins lourde si le monde du travail apparaissait aux jeunes plus attractif. Quant à la sélection, la question serait moins brûlante si la répartition des « places » était seulement technique. Or la concurrence règne pour accéder à l’emploi et il est certains emplois que personne ne veut occuper. Ils le seront néanmoins, par des femmes, des immigrés, des jeunes moins bien pourvus en mérite scolaire. Les enjeux de la formation seraient moins dramatiquement vécus si les emplois eux-mêmes étaient moins inégaux. Mais nombre d’emplois sont aujourd’hui jugés inacceptables par un ensemble de jeunes dont le niveau scolaire est élevé :
Une chose est certaine : on ne peut décréter la revalorisation des métiers manuels et de l’apprentissage d’un coté et, de l’autre, défendre des politiques d’abaissement du coût salarial des jeunes tout en encourageant l’élévation forte de leur niveau d’études. (Voir E. Verdier, Politiques de formation des jeunes et marché du travail, in Formation Emploi Numéro 50, 1995 Pages 19 à 40). La désertion actuelle de certains emplois s’explique par le fait que les jeunes font tout pour les éviter. Enfin, les discours récurrents sur la diversification des formes d’excellence ou la revalorisation des formations professionnelles sont condamnés à rester purement incantatoires tant que les emplois sur lesquels débouchent les formations en question demeurent aussi inégalement attractifs.
Alors, le mérite ?
Pour l’heure, il est convoqué afin de justifier la stratification sociale et
les inégalités. C’est un vernis moral.
En clair, l’égalité des chances proclamée justifie des inégalités de situations
réelles : croire en la méritocratie rend plus tolérant aux inégalités
existantes puisque tout le monde a eu sa chance (en principe) et ce sont les
meilleurs qui ont gagné. Or l’égalité des chances n’est qu’une
composante de la justice sociale ; mais la justice ne consiste pas
seulement à assurer à tous des chances égales d’atteindre des positions
inégales. Elle doit aussi limiter les inégalités entre positions. Réduire les inégalités entre les situations des adultes (donc entre parents), c’est en même temps réduire les inégalités entre les milieux où grandissent les enfants, et donc entre les chances de ces derniers. L’égalité des chances, dès lors que la société est inégale, restera éternellement une aporie.
En guise de conclusion… provisoire : VERS DES ECOLES EFFICACES, EQUITABLES ET JUSTES… Efficacité, équité, absence d’humiliations et de violences sont des objectifs complémentaires et non pas concurrents. Les pays scandinaves, comme souvent en matière sociale, montrent la voie. Par ailleurs, les usagers du système scolaire adhèrent aujourd’hui à ces trois objectifs : - plus aucun groupe social ne dédaigne ni ne rejette l’école - plus aucun enseignant (à part quelques uns qui écrivent des livres de ressentiment) ne pense que l’école est quitte de l’objectif d’enseigner le plus de compétences possible au plus grand nombre
Imaginons, avec Gaëtane Chapelle et Denis Meuret, le scénario (optimiste) suivant : La Nation devra se persuader (ou devra l’être par les politiques) que : -
l’éducation est un des
moyens de faire face aux défis d’une économie ouverte -
l’éducation est un des moyens d’accroître les
capacités des individus à faire face à un environnement instable. Deux objectifs sont à en déduire, de manière REELLE ET URGENTE : -
accroître la maîtrise des
compétences de base en ne laissant personne quitter le système sans un socle
commun de compétences ET de connaissances -
donner aux élèves la
capacité de faire face au nouveau, à l’inattendu avec la mobilisation de TOUTES
les disciplines pour favoriser la prise d’initiative, le travail collectif, la
critique, l’invention, l’expérimentation. Dans un tel projet, les
personnels d’éducation adhèreraient car les compétences favoriseraient la
construction de la citoyenneté, de l’humanité des individus. Les enseignants
n’abandonneraient en outre pas leur discipline mais retrouveraient au
contraire, en rejetant tout encyclopédisme, le sens de leur présence dans UN PROJET GLOBAL D’
EDUCATION. Ce projet devra être porté aussi par les chefs d’établissement
dont la responsabilité pédagogique devra être accrue dans des établissements disposant
de plus de libertés dans le choix des programmes pédagogiques. Certains modes de scolarisation, d’organisation, sont plus efficaces que d’autres : - il ne faut pas mettre à part les élèves faibles : faire redoubler, orienter dans des filières spécialisées les élèves « à l’esprit pratique » (bel euphémisme…), former des classes ou des établissements homogènes, tout cela est nuisible aux plus faibles sans profit pour les plus forts. - Les dispositifs scolaires qui fonctionnent partagent certaines caractéristiques :
Dans notre scénario, il faudra mettre en place un environnement pédagogique exigeant, stimulant et aidant où les équipes enseignantes seront encouragées à essayer, à évaluer et à apprendre de leurs erreurs. Deux aspects possibles à un tel environnement : - mettre en place des programmes qui fournissent aux acteurs de terrain des outils riches de dispositifs, d’outils efficaces, parmi lesquels ils pourront choisir - mettre en place des procédures de responsabilisation, de compte-rendu, qui incitent les acteurs à choisir ces dispositifs et à en évaluer les effets. Un système d’incitation est efficace s’il engage les enseignants à trouver eux-mêmes ce qui convient à la situation de leur classe et à exiger de leur tutelle les ressources, la formation et l’aide qui leur serviront véritablement au mieux
- Les enseignants, dans ce scénario, seraient alors plus des experts que des artistes ou des intellectuels : §
Quelqu’un qui connaît une grande variété de procédures complexes et choisit les
plus adaptées §
Quelqu’un moins exposé personnellement mais plus attentif professionnellement Quant aux établissements, leur autonomie devra être plus professionnelle qu’administrative. Des procédures d’évaluation devront être mises en place, non pas pour faire entrer l’Ecole dans un système concurrentiel mais, entre autres, pour révéler au public le caractère exigeant de la profession : emmener ENSEMBLE ses élèves vers un niveau de maîtrise requiert un haut niveau de compétences. Ces procédures révèleraient aux élèves que le travail des enseignants consiste à les aider à « grandir » au moyen de la matière qu’ils enseignent. (Grand public, Parents et Elèves sont souvent très loin de ces réalités). Les objectifs annexes seraient tout aussi importants : §
Réduire le clivage entre enseignants faisant le « sale boulot » et
les autres §
Réunir les deux aspects du métier : relation à l’élève ET à la discipline
enseignée §
Trouver les sources d’une bonne distance à l’élève. L’insistance sur la
participation, l’absence des classes de niveau et du redoublement, la pratique
du tutorat, le fait que les enseignants se réfèrent plus à leur METIER qu’à
leur STATUT diminueraient les « violences » à l’ Ecole. - Les usagers pourraient choisir leurs établissements dans des conditions telles que les effets négatifs de choix seraient supprimés (je rappelle que je suis ici dans le cadre d’un scénario optimiste). D’une part, la politique « ZEP » doit être renouvelée, en aucun cas supprimée ! Ces établissements, à l’intérieur desquels les équipes pédagogiques accomplissent des prouesses quotidiennes dans l’anonymat le plus total et l’absence de reconnaissance, devront recevoir une surdotation significativement plus forte que celle octroyée aujourd’hui. D’autre part, « l’ampleur de ces surdotations devra dépendre de la proportion d’élèves défavorisés » (Claude Thélot). Elles reposeront sur des procédures simples et ne devront pas reculer devant le fait de privilégier, parmi les élèves défavorisés, les plus prometteurs. Quant au choix des établissements, il se fonderait, non pas sur l’efficacité de l’enseignement des compétences fondamentales, encore moins sur le détournement de la carte scolaire devenu « sport national » des familles aisées, mais sur la partie non contrainte de l’enseignement. L’orientation vers des filières plus ou moins exigeantes se devra se faire, elle, sur la maîtrise des compétences fondamentales au moment de l’entrée en lycée ou bien, si le Lycée était intégré à la scolarité obligatoire, au moment de l’entrée dans l’enseignement supérieur. Trois conséquences positives nos yeux : § Un tel système assurant que les élèves d’un même établissement présentent une forte hétérogénéité dans la maîtrise des compétences (le Banding System à Londres) deviendra alors acceptable par toutes les familles puisqu’une qualité d’enseignement sera garantie pour tous et par tous. Cette mixité (Forts et faibles ensemble) se traduira par plus d’efficacité et d’équité § La possibilité de choisir son établissement ne pourra plus être induit par leur hiérarchisation provoquant à la fois la ségrégation urbaine et la ségrégation scolaire. Au contraire, s’établira alors une coopération entre établissements permettant à ceux-ci d’offrir aux élèves un éventail maximal d’activités et de s’entraider pour la réalisation d’objectifs communs. § Le choix de l’établissement donnera alors à tous les possibilités dont profitent actuellement les plus favorisés. Ce
scénario, car ce n’est qu’un scénario, est sans doute caricaturalement
optimiste. MAIS il montre des pistes à emprunter. Beaucoup d’enseignants, de
parents et d’élèves y sont prêts. Travail de recherches et de synthèse effectué par Christophe Chartreux 35 rue P Bazin 76370 Neuville les Dieppe 02 35 06 24 83 Petit « catalogue »
d’idées-forces - En
près d’un siècle, la « révolution pédagogique », soi-disant
responsable de TOUS les maux de l’école, n’a pas eu lieu ! Au contraire,
l’Ecole reste prisonnière de son Histoire. - Les
« adorateurs » d’un age d’or de l’Education Nationale se trompent et
nous trompent ! - Morale
et Justice ne sont ni de droite ni de gauche ; elles sont
nationales ! Ce que l’on en fait, en revanche, est soit de droite, soit de
gauche, c’est certain ! - Des
réformes nombreuses ont voulu
transformer l’école ; bien peu ont été effectivement appliquées. Aucune, de fond ni d’importance,
ne l’a été sur des durées excédant 5 ans. - L’Ecole…ça
n’existe pas ! Elle n’est
que DIFFERENCES ! - L’école
garde des règles de vie et des pratiques pédagogiques héritées du siècle
dernier. L’échec scolaire a bon
dos ! Il résume tout et n’explique rien ! - Toute
classe est une classe hétérogène. - L’hétérogénéité
réduit extrêmement peu le niveau de l’élite en augmentant bien plus le niveau
des plus faibles. - La
constitution de classes homogènes a des effets préjudiciables sur le plan socio
affectif, et ceci pour les élèves placés dans les groupes les plus faibles. - Education
et Instruction sont inséparables - L’échec
scolaire est aussi vieux que l’école obligatoire. Il n’a jamais existé d’age
d’or de l’enseignement. - L’échec
scolaire a une fâcheuse tendance à révéler impitoyablement les inégalités
sociales - Le
système éducatif tranche dans le vif. C’est à 6 ans que l’on trie les
« bons » et les « mauvais ». - La
prétendue « baisse de niveau » est un fantasme engendré par une
société inquiète de son avenir et de son Ecole. Ce qui ne signifie pas que tout
aille bien. - Aucune
lumière n’a jamais jailli des disputes entre tenants de la méthode globale de
lecture (jamais appliquée) et tenants de la méthode alphabétique ou syllabique
(B-A- BA). - Une
seule chose est sûre : aucune méthode d’apprentissage de la lecture n’a su
garantir à 100% la réussite des enfants. - 83%
des professeurs d’école donnent des devoirs à la maison ; leur non
exécution n’est pas admise. ( POURTANT ILLEGAL EN ECOLE PRIMAIRE !) - De
l’imagination pédagogique et des innovations naissent le malheur et le
scandale, dit on ici et là ! On leur préfère donc un siècle de savoir-faire
réécrit au goût du jour ! Jusqu’ à l’ennui… - Il
est nécessaire d’avoir des idées biodégradables en pédagogie. Il faut se
débarrasser des stéréotypes. - Les
professeurs d’école exerçant en maternelle pratiquent un militantisme
pédagogique positif hors du commun. - Ce
n’est pas le laxisme qui menace l’école primaire, mais la médiocrité - Le
« mérite » est aujourd’hui convoqué pour justifier la stratification
sociale et les inégalités. C’est un vernis moral. - Rien
n’est plus important que la dimension affective dans l’enseignement du premier
degré - TOUTES
les études prouvent que les maîtres passent leur temps, bien au-delà des
horaires officiels, à faire du Français et du Calcul et, plus précisément, de
la lecture et des opérations. - L’enseignant
a trop souvent tendance à se « couper du monde ». Il ne peut pourtant
s’abstraire, contrairement à ce qu’affirme Jean Paul Brighelli dans ses
« ouvrages » par exemple, de l’environnement de son établissement. - Les
inégalités sociales de « carrière scolaire » sont très fortes en
France ; trop fortes. - Le
développement culturel de l’enfant est SOCIAL, - En
deux ans (5ème/4ème surtout), autant d’inégalités
« socio/scolaires » se créent que pendant TOUTE la scolarité
primaire. - Les
inégalités sociales de carrière scolaire s’expliquent pour une part
équivalente :
- Améliorer
l’efficacité de l’école, dès lors que ce sont les moins favorisés qui sont les
plus sensibles à son influence, est donc une manière de réduire les inégalités
entre élèves mais AUSSI les inégalités sociales. - Le
fonctionnement même des classes fabrique et reproduit certaines inégalités
sociales - Tout
un pan de la lutte contre les inégalités sociales passe par une
« formation » des parents. - L’éducation
sert aussi à se classer par rapport aux « concurrents ». Et au fur et
à mesure que les scolarités s’allongent, les écarts sociaux se déplacent plus
avant en prenant par exemple la forme de l’accès à telle ou telle
filière : c’est la « démocratisation ségrégative » (négative) - Des
politiques d’allongement du tronc commun ou le développement des passerelles
entre filières sont susceptibles d’atténuer les inégalités sociales. - Il
FAUT aller vers une attitude plus expérimentale où enseignants ET chercheurs
concevront et évalueront les effets précis de tel dispositif sur tel public - La
question de la réduction des inégalités socio scolaires est fondamentalement
POLITIQUE. - La
violence à l’école est constituée de faits ténus, mais répétitifs et
nerveusement usants, du genre « incivilités »,
« harcèlements » ou « micro-violences ». - Les
« mauvais élèves » manifestent une agressivité impuissante à
l’encontre des professeurs qui n’est en fait qu’une contestation impuissante de
leur place scolaire, - La
pédagogie pratiquée (style coopératif) et le style de gestion de la Direction
(participatif) sont des facteurs de protection bien identifiés. - L’existence
des classes de niveau est un facteur majeur de risques, deux fois plus
explicatif que la monoparentalité par exemple. La ségrégation scolaire est LE
danger réel. - Les
écoles, dans lesquelles les élèves perçoivent des règles claires, des actions
valorisantes et des sanctions sans ambiguïtés, bénéficient de moins d’indisciplines. - Un
encadrement strict (militaire ou autre, là n’est pas le problème) ACCOMPAGNE
d’un travail éducatif et culturel AVEC PROJET porte TOUJOURS des fruits. - Le
combat contre la violence à l’école est un combat politique contre la
démagogie. - La
promotion du « marché » en matière scolaire est bien une politique de
classe. - La
relation Professeur/Elève est CENTRALE dans la vie quotidienne de l’institution
scolaire - Pour
vivre ensemble, enseignants et élèves doivent gérer, dans les collèges et
lycées, l’arrivée d’une culture juvénile de plus en plus légitime - Il
faut OFFICIELLEMENT reconnaître que la réussite éducative est diversement
difficile à atteindre selon l’environnement des écoles et des collèges. Il faut
donc mettre en place une très forte diversification qualitative et quantitative
des moyens d’enseignement. - Le
redoublement a fait la preuve de sa totale inefficacité. - Il
est prouvé que retirer 5 élèves sur un effectif de 25 n’aura aucun effet ;
en revanche, retirer 5 élèves sur un effectif de 15 est porteur d’excellents
résultats. - Les
élèves faibles qui redoublent progressent moins que les élèves faibles qui sont
promus. Il faut donc explorer d’autres pistes que le redoublement. - Le
cours magistral (et frontal) en Primaire et en Collège (voire même en lycée)
est plus qu’une erreur : c’est une faute professionnelle. - Quand
le scolaire dévisse, le social se lézarde… - Travailler dur pour être récompensé, certes mais récompenser chacun à hauteur des efforts fournis… |